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 Dog Love - Jeremiah&Emily

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❝ love's in the air. ❞Dog LoveTenir le magasin durant ces longues journées était agréable. Leon me disait souvent que j'étais bien trop sérieux à toujours faire attention à cette clochette me signalant l'entrée d'un client, c'en était parfois lassant… Mais j'aimais ça. Flatter la tête de Fluff, mon chien d'aveugle, pour ensuite aller toucher quelques étiquettes histoire de me remémorer de où se trouvait quoi… J'avais installé du braille partout : sur les pancartes désignant quel bac contenait quoi, sur les étiquettes qui me permettait de ne pas compter sur l'honnêteté variable de certains clients… Cette machine avait été un sacré investissement mais je l'aimais, lui donnant même un petit nom : Etty. Elle me facilitait la vie, et me permettait de gérer seul le commerce, quand mon mari se reposait - enfin je l’espérais. Vu que je ne le surveillais pas en permanence. Heureusement que j’avais la délicieuse Evelynn qui était douée pour garder un oeil sur lui. Il fallait d’ailleurs que je lui prépare son chèque… Histoire qu’elle ne finisse pas sans sa paye du mois.

Ainsi ces journées pouvaient sembler très longues à Leon mais pas à moi. J'aimais ce calme, puis le contact avec le client qui pouvait venir. J’en profitais pour ranger un peu, ou lire un livre en braille que j’achetais à cette adorable libraire, et aussi j’écoutais un peu de musique. Cela me permettait aussi de prendre le temps de gérer la maison, les factures, sans que Leon ne soit dans mes pattes. La dolce vittà à l’état pur. Exactement tout ce que je désirais lorsque j’avais supplié Leon de raccrocher son emploi à Londres, pour que nous venions ici, tous les deux. J’avais eu besoin de prendre un peu de temps pour moi, pour simplement nous aussi. Je m’étais marié avec cet homme malgré ce que pouvaient dire mes parents, je leur ai craché à la gueule pour ses beaux yeux. Enfin, pas que. Il fallait dire qu’ils l’avaient mérité. Mais le fait était que j’avais épousé Leon, et que je voulais l’être longtemps. Même s’il m’énervait.

Et là, il m’énervait à juste me hanter littéralement dans ma tête, alors que monsieur était à l’étage.

Je passai un coup de serviette désinfectante sur le comptoir, histoire de le nettoyer. Ca me détendait. Mais cela ne dura pas bien longtemps, au contraire : la petite sonnette se déclencha à l’ouverture de ma porte de magasin et je levai directement la tête, afin de tenter de reconnaître la personne qui venait d’arriver. J’aimais pouvoir être surpris ainsi par l’arrivée de quelqu’un, jouer à qui suis-je. M’intéresser aux bruits, aux sons. Et là, j’entendais que madame arrivait avec son chien, et ce parfum… Je le connaissais. C’était Emily Dunham, de la mairie, celle qui m’avait aidé avec l’aspect juridique de Fairy Sound !

”Oh, bonjour Mlle Dunham ! Quel plaisir de vous voir dans ma modeste boutique.”

Cependant, j’eus à peine le temps de savourer sa présence que j’entendis Fluff, mon chien, se mettre à japper. Japper ? Qu’est-ce qu’il me faisait… Mais en face, j’entendais aussi le chien d’Emily bouger, et que… Ce n’était pas une agression, bien que je tentai de rappeler Fluff à moi, au pied, tout en essayant de rattraper sa laisse que j’avais posée sur le comptoir, sans penser qu’il partirait d’un coup comme une flèche, la faisant tomber de ce fait.

”Oh mon dieu, Mlle Dunham, je suis désolé, Fluff n’est pas si… Je ne sais même pas ce qu’il fait, je suis totalement confus…”

Même lorsque je tirai sur la cordelette, doucement, pour le faire revenir… Il resta auprès du chien de ma cliente. Oh non… Ce n’était pas bon ça. Voilà pourquoi je n’aimais pas les animaux ! Ils n’étaient pas capables de bien se tenir. Bon, en réalité, Fluff était généralement très calme, un bon chien, je pouvais le supporter un minimum, mais dès qu’il faisait ne serait-ce qu’un pet de travers, je m’énervais. Saleté !
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Je parcourus mon étagère de CD du doigt en pinçant les lèvres. J’avais collé de fines étiquettes en braille sur les tranches, avec juste assez d’info pour savoir de quel album il s’agissait. Ma cécité nécessitait un sens de l’astuce et une certaine organisation. Avec un sourire, je me dis que si Darleen devenait aveugle, elle serait dans une sacrée mouise. Heureusement pour moi, j’avais pu élaborer mes petits trucs du quotidien très jeune, et me forger une rigueur bien utile. Andy m’avait beaucoup aidée, aussi. Il m’avait appris une bonne partie des gestes qui me venaient aujourd’hui comme un réflexe. J’arrivai au bout de l’étagère, soupirai. J’avais l’impression de connaitre ces CD par cœur. De les avoir entendus plusieurs centaines de fois. C’était peut-être bien vrai pour une partie d’entre eux d’ailleurs. La musique était un moyen efficace et formidable de combler le vide quand j’étais seule. Puisque je ne voyais pas, la musique me sortait du noir. C’était cathartique, souvent, indispensable parfois. Mais là, toute la musique en ma possession ne me satisfaisait pas. Alors je souris et attrapai la laisse de Woody. Il était temps d’aller acheter de nouveaux CD. Et ca tombait bien, Bray comptait une des meilleures boutiques de musique que j’avais jamais connue. Elle était tenue par Jeremiah James, qui était venu me voir à la mairie pour les questions légales concernant l’ouverture de ladite boutique. Coïncidence, Jeremiah s’avérait aveugle comme moi, et il avait donc été plutôt content de tomber sur quelqu’un qui pouvait éditer des documents en braille, les relire avec lui, et comprendre que « signez en bas du document » n’était pas si simple que ça quand on ne voyait pas le bas du document. J’avais promis de venir visiter son magasin, j’avais tenu ma promesse. J’avais alors été agréablement surprise, voire impressionnée, par la variété de la collection de Jeremiah. Et aussi par sa culture. On trouvait forcément son bonheur à Fairy Sound, et c’était souvent Jeremiah qui vous le faisait découvrir. J’étais donc revenue, plus d’une fois. J’y allais sûrement aussi souvent que chez Aisling, la libraire. J’étais plus que ravie de dépenser mon salaire à Fairy Sound, comme je m’apprêtais à le faire.

Je passai la porte et la petite clochette émit un son qui m’était devenu désormais familier. C’était Jeremiah qui était là aujourd’hui. Parfois, c’était son mari qui tenait la boutique. Un ancien procureur, je connaissais bien son nom, je l’avais admiré pendant longtemps. Je n’avais juste pas encore osé le lui dire. C’était plus simple, avec Jeremiah.
Oh, bonjour Mlle Dunham ! Quel plaisir de vous voir dans ma modeste boutique.
"Monsieur James, comment all… »
Je n’eus pas le temps de finir ma phrase que Woody tira d’un coup sur sa laisse en jappant joyeusement. Il répondait en fait à un autre jappement. Je lâchai un « Woody ! » légèrement colérique, déséquilibrée par sa ruade. Et bien que ni Jeremiah ni moi ne pouvions voir la scène, nous imaginions bien ce qui se passait. J’entendais les deux chiens japper, et le bruit des pattes sur le sol. Ils sautaient dans tous les sens, se tournant autour en jouant. Jeremiah s’excuse et semblait désolé et en colère. Je haussai les épaules et ris.
« Pas de souci ! Je crois que Woody et Fluff ont eu un coup de foudre canin. »
Je tirais en même temps sur la laisse de Woody que j’avais réussi à garder en main Dieu sait comment, essayant de le ramener vers moi et de le calmer. Mais il semblait transi pour Fluff. Leurs jappements joyeux couvraient presque l’espace. Je m’approchai de Jeremiah.
« En attendant qu’ils se calment, comment allez-vous ? Et votre mari, il va bien ? Je l’ai vu la dernière fois, il avait l’air fatigué. »
C’était façon détournée d’avoir des nouvelles de Leon. De ce que j’avais compris, Leon avait lâché son boulot de procureur peu de temps après s’être mis en couple avec Jeremiah. Il était passé de procureur réputé à gestionnaire d’une boutique de CD et vinyles. Sacré changement de vie. C’était tout à son honneur d’ailleurs. Mais Evelynn m’avait glissé que Leon avait quelques soucis de santé qu’il cachait bien au reste du monde. Woody tira encore sur sa laisse et son jappement se transforma en aboiement franc et bruyant.
« Woody, chut ! » lancé-je au chien avant de soupirer. « Désolée pour le bazar, vous voulez que je le sorte ? »
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❝ love's in the air. ❞Dog LoveJe ne comprenais vraiment pas les animaux. Un coup de foudre canin ? C’était du grand n’importe quoi ! A force de tâtonnement, j’étais parvenu à rattraper sa laisse, une bonne fois pour toute, et histoire d’être certain qu’il ne s’en irait pas faire des bébés chiots à Woody, je l’accrochai à l’anneau que j’avais installé pour ces moments où je déambulais dans les magasins. Je n’avais pas envie d’avoir à faire à un chien fou quand je m’occupais d’un client, ou quand je rangeais… Mais au moins, j’étais face à Emily, qui avait la tête sur les épaules et retenais son animal. Tant mieux ! Elle riait, et je tentai de faire de même, histoire d’être avenant, alors même que cette histoire me gonflait sérieusement. Il fallait vraiment que je me détende… Ils étaient après tout assez éloignés l’un de l’autre.

”Fluff ! Silence !”

Même cet ordre donné avec autorité le calma à peine, alors qu’habituellement il n’était pas désobéissant - bien pour cela que j’arrivais à m’adapter aux chiens d’aveugles, enfin, celui-là tout particulièrement. Mais au moins, Emily passa à autre chose, demandant comment j’allais, et aussi Leon. C’était vrai que ces derniers temps il toussait beaucoup, au point que je commençais à avoir des angoisses, incontrôlables, peut être même idiotes. Il fallait vraiment que je trouve un moyen de le soigner… Je résistais déjà à grand peine de voir dans l’avenir combien de temps il restait… Mais je devais être fort, et surtout garder cette image lisse que je me plaisais à offrir au reste du monde :

”Oh, nous allons bien, merci… C’est vrai qu’il a l’air fatigué, mais il reste Leon, avec ses trésors d’énergies dont je me demande où il les trouve ! Et vous ?”

C’était l’un de mes grands défauts : j’aimais quand ce qui était inquiétant, pas positif, reste chez moi. Je m’occupais de Leon, avec l’aide non négligeable d’Evelynn, et j’avais du mal à passer la main. Déjà Evelynn avait bien ramé avant de parvenir à réellement obtenir mon approbation. Leon me comparait lui-même à une matriarche aristocrate qui se souciait trop du qu’en-dira-t-on… Ce n’était pas faux d’une certaine façon.


Cependant, j’avais à peine retourné la question à Emily que Woody tout comme Fluff se remirent à aboyer de plus belle ! Ma pauvre cliente commença même à s’excuser, proposant de la sortir. Oh non certainement pas ! Ce n’était pas à la clientèle de s’adapter, ça non. Alors, j’eus une idée :

”J’ai mieux pour le moment, attendez, je vais le rentrer à la maison.”

Il y avait une petite porte dérobée, qui s’ouvrait sur des escaliers menant directement à l’appartement où nous avions installé notre cocon conjugal. Je pris alors Fluff par le collier afin de le forcer à monter ces escaliers, et petit à petit, ils semblèrent se calmer tous les deux. Il était temps ! J’en avais la tête qui résonnait. En tant qu’oracle, j’étais sensible aux stimulis extérieurs, et particulièrement aux sons, qui pouvaient me déclencher des migraines effroyables. Et je ne voulais pas avoir de migraines, pas lorsque Leon n’était pas en forme. Le désavantage de l’oreille absolue, n’est-ce pas ? …

”Ah ! … Du silence. C’est agréable, n’est-ce pas ?”


J’appréciais d’autant plus ce silence, qu’en cette fin de journée, il me permettait de capter la vie extérieure au magasin; J’aimais ce bruit de la vie, simplement, les gens qui passaient devant la vitrine, les voitures voyageant dans les rues. Mais maintenant que l’affaire coup de foudre était terminée…

”Je disais donc, nous allons bien, et vous ? En manque de musique, en ce moment ?”
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La situation était plutôt cocasse. Jeremiah et moi tentions de communiquer, et nos chiens se donnaient un malin plaisir à nous en empêcher en aboyant de plus en plus fort. Jeremiah réussit néanmoins, dans un moment de calme, à me dire qu’il allait bien, et que Leon également. Je souris. Quand on n’a plus que les oreilles pour interagir avec les gens, on apprend à discerner certaines intonations, qui donnent des indices sur ce que ressentent les gens. Et à entendre Jeremiah, on devinait l’attachement profond qui le liait à son mari. C’était beau, de sentir un couple solide. Ca permettait d’y croire encore. J’étais une idéaliste, mais il faut avouer que la réalité parfois était cruelle. Les couples se formaient et se déformaient plus vite que mes fringues. Andy vivait seul, alors qu’il était probablement l’une des meilleures personnes sur la planète Terre. J’avais eu quelques espoirs, en donnant tout ce que j’avais, mais ça n’avait pas empêcher deux ou trois hommes de me briser le cœur. J’avais brisé le cœur d’un ou deux, aussi, faut avouer. A chaque fois on croit que c’est le bon, et puis…finalement non. Mes parents avaient ce genre de relation, passionnée, fusionnelle, solide. Mais je n’avais pas pu voir cette relation, toujours mise à l’écart. Alors voir un couple comme Jeremiah et Leon, qu’on pourrait penser mal assortis au premier abord, c’était un vrai plaisir.
Je m’apprêtais à répondre à Jeremiah quand les chiens décidèrent que le calme était terminé. Je grimaçai. Ca devenait agaçant.

Mais Jeremiah refusa que je sorte Woody et, à la place, fit rentrer son chien. Pratique, d’habiter littéralement à côté de son lieu de travail.
Ah ! … Du silence. C’est agréable, n’est-ce pas ?
« Très agréable ! Merci. On a du mal à se déplacer sans ces boules de poils, mais des fois elles sont compliquées à gérer. »
J’aimais Woody, je l’adorais. Il m’avait tellement aidé quand j’étais dans la panade. Il n’était pas seulement mon guide, qui me permettait de ne pas me prendre tous les murs sur mon chemin et de rester en vie quand j’arrivais à un passage pour piétons. Il était aussi un ami. Il m’écoutait quand je lui racontais ma vie. Il venait se blottir contre moi quand il sentait que j’allais mal. Il savait quand j’étais heureuse ou malheureuse, en colère, triste. Et il était toujours là pour moi. Grâce à Woody, je ne m’étais jamais sentie seule. Néanmoins, des fois, il était agaçant. Il restait un chien. On pouvait difficilement le raisonner. Et je m’étais énervée sur lui plusieurs fois, avant de le regretter.

Je disais donc, nous allons bien, et vous ? En manque de musique, en ce moment ?
Je souris et haussai les épaules. Un mouvement complètement superflu, étant donné que Jeremiah était incapable de le voir.
« Je vais bien, oui. La routine, vous savez. Je suis encore un peu en train de prendre mes marques ici. »
Ce qui n’était pas chose aisée. Je n’avais pas vraiment choisi de revenir à Bray. Et cette ville dégageait beaucoup de souvenirs. Et des ondes un peu étranges. Mes visions étaient plus fortes, plus fréquentes depuis que j’étais revenue. Et je savais que cela avait à voir avec la ville. Sans compter ma mère, dont l’état n’irait qu’en empirant. Mais je n’avais pas envie d’en parler. Pas envie d’embêter avec toutes ces histoires auxquelles ni lui ni moi ne pouvions rien.
« Et oui, je suis en manque de musique. J’ai l’impression d’avoir fait le tour de ce que j’ai. Vous auriez quelque chose de nouveau à me proposer ? Celui que vous m’aviez conseillé la dernière fois était phénoménal ! J’aimerais quelque chose dans le même jour, un peu solaire, avec une instrumentale sympa. Pas trop violent, parce que sinon ma colocataire va me foutre dehors… », ajoutai-je avec un sourire. « Les affaires marchent bien ? C’est une bénédiction d’avoir une boutique comme la vôtre dans le coin. A Detroit, j’en avais une au bas de ma rue, j’avais peur de ne plus jamais retrouver ce genre d’esprit en partant. »
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❝ love's in the air. ❞Dog LoveRenvoyer Fluff à celui qu’il devait certainement prendre pour son veritable maître, c’était la meilleure idée que je pouvais avoir à present. Le calme… Leon avait une sorte de talent avec cette tornade, c’était fou. Si avec moi il pouvait avoir ces espèces de crise de je-ne-savais-quoi où il devenait insupportable, avec Leon d’un coup c’était beaucoup plus calme… Je le prenais un peu mal, il fallait l’avouer. C’était mon chien, qui avait été dressé pour moi, et voilà qu’il préférait mon propre mari ! Il n’avait qu’à l’épouser lui. Je ne lui en voudrai pas, Leon est génial. Mais c’était le mien, et je devais lui apprendre qui était le chef ! Bref, je devais m’occuper de ma cliente, qui avait bien raison lorsqu’elle disait qu’ils étaient indispensables, ces chiens, juste… compliqués à gérer. Très compliqués.

Puis je réengageais la conversation, je n’allais pas laisser deux chiens en manque d’amour me couper dans mon élan commercial – et un peu amical, je devais l’avouer. J’appréciais Emily, c’était une personne bien, calme. C’était agréable de parler avec elle, car elle avait cette énergie solaire qui ne prenait pas trop de place, ce caractère posé qui m’allait bien, cette pudeur aussi. Ce qui était nettement agréable, et bien plus compatible avec mon propre caractère. J’étais content qu’elle se plaise assez ici pour prendre ses marques, et encore plus lorsqu’elle me complimenta concernant ma boutique. C’’était touchant d’avoir ces remarques, d’autant que si j’avais créé cette boutique, ce n’était pas seulement pour avoir un gagne-pain tandis que Leon se reposait, mais aussi car j’avais cette passion que je voulais partager avec quelques amateurs mélomanes. J’étais tellement touché par les paroles d’Emily que je me mis même à sourire, tandis que je parlais à mon tour.

« Merci beaucoup pour ces compliments… Ca me va droit au cœur. Donc… Quelque chose de plus sobre, instrumentale sympa, pas trop violent… Hum… »

Tandis que je réfléchissais à ce que je pourrais proposer, je me mis à faire le tour des bacs de CD que j’avais rangé le matin même. C’était ainsi que je pouvais trouver de l’inspiration, et j’en trouvai une, à portée de doigt. C’était un petit album, sorti il y avait un moment déjà, d’un chanteur américain qui avait ce soul pas désagréable, et une voix envoutante. Il n’avait rien sorti depuis 2011 mais on savait qu’il était toujours en activité, car il se produisait notamment dans des petites salles, de façon presque confidentielle. Il n’était pas compliqué de trouver ces vidéos live absolument délicieuses sur Youtube, de même il avait un bon succès, puisqu’il avait fait son apparition dans cette série sur Netflix, Luke Cage.

Je récupérai un CD, qui était déjà ouvert heureusement, et je le mis dans la chaîne hi-fi qui servait à faire écouter les CD. Et les premières notes de la chanson [i]The way I see it[/b]. J’étais plutôt fan de cette tension dans la musique. La sobriété n’était pas totalement au rendez-vous, cependant, au moins tout colocataire devrait accepter ce niveau de voix qui n’était pas trop violente. Je laissai la musique s’écouler durant quelques secondes, au moins la première minute, avant de demander à Emily son opinion :

« Qu’est-ce que vous en dites ? Je l’ai découvert assez tardivement, je dois avouer, et je ne sais pas s’il ressortira un autre album depuis le dernier de 2011 mais… Ce serait dommage de se priver. »

Je laissai encore la musique s’écouler. On pouvait largement s’entendre parler par-dessus, au contraire. Je trouvais que c’était très sympathique à écouter, au niveau du son d’ambiance. Je m’imaginais plus tôt bien lire un livre en braille, assis sur le canapé, en écoutant cette chanson. C’était plutôt posé, au final.
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Jeremiah avait cette façon de chercher avec beaucoup de concentration. J’entendais ses doigts rabattre les CD les uns après les autres, et son aura emplissait d’un coup la pièce. C’était assez fascinant, même si je ne pouvais pas le voir en action. Il prenait réellement son métier à cœur, et le conseil à ses clients notamment. Il ne faisait pas que vendre des CD. Il vivait la musique. Il voulait faire découvrir, et aimer, la musique aux gens. Et il ne m’avait jamais mal conseillé depuis que je fréquentais sa boutique. Il avait du goût, c’est certain. Mais il avait surtout un certain talent pour décrypter les gens. Pour les comprendre et savoir ce qu’ils aimeraient musicalement. De l’empathie, je pense que ça s’approchait de ça.
Jeremiah stoppa sa danse de recherche et j’entendis la chaine hi-fi se mettre en route. Je souris alors ; il avait trouvé quelque chose. Et à ce moment, j’étais comme une gamine le matin de Noël devant ses cadeaux. Me demandant ce qu’il y avait à l’intérieur, excitée à l’idée de les ouvrir, d’avoir de nouvelles choses pour moi. Fébrile, un peu peureuse aussi. Et si ça ne me plaisait pas ? Et si j’étais déçue ?
Mais je ne fus pas déçue. La musique emplit la pièce et dès les premières notes, mon sourire s’agrandit. Jeremiah avait visé juste, une fois de plus. Instinctivement, je me mis à bouger légèrement en rythme. C’était pile ce qu'il me fallait en ce moment.

« Qu’est-ce que vous en dites ? Je l’ai découvert assez tardivement, je dois avouer, et je ne sais pas s’il ressortira un autre album depuis le dernier de 2011 mais… Ce serait dommage de se priver. »
« 2011 ? Moi qui allait vous demander si vous aviez d’autres albums ! C’est génial. Merci beaucoup. Vous êtes une perle. »
Je souris. La musique courait toujours en arrière plan et elle était meilleure avec les secondes. Le cadeau était à la hauteur de l’attente.

« D’ailleurs, ça me fait penser qu’on parle beaucoup de mes goûts musicaux. Mais on n’a jamais parlé des vôtres ! Ca doit être difficile de vendre des artistes que vous n’aimez pas, non ? »
Je me rendais compte que c’était presque égoïste. De toute évidence, Jeremiah était un passionné de musique. Mais il ne faisait qu’écouter la musique des autres. Et j’ignorais ce qui lui plaisait, ce qu’il aimait écouter. Pourtant, j’étais assez persuadé que la phrase « dis-moi ce que tu écoutes, je te dirai qui tu es » était vraie. Je savais qu’elle s’appliquait relativement bien à moi. Je n’avais pas la prétention de dire que je cernais les gens. Je ne faisais que de la psychologie de comptoir, comme tout le monde. Mais j’avais vu des gens écouter des artistes qui collaient bien avec leur personnalité. Les albums qui nous restent et qui nous collent à la peau sont ceux qui nous correspondent. Et le pauvre Jeremiah devait se résoudre à vendre de la mélasse à ses clients, reniant par là même ses principes musicaux. Le sacrifice du commerce.

"Ca me fendrait le coeur si un client venait me demander un artiste que je déteste, au lieu d'un petit artiste qui mériterait d'être connu. Je crois que j'essaierais de le convaincre jusqu'à le faire fuir" , ajoutai-je en riant doucement. « Qu’est-ce que vous écoutez en général ? Quels albums vous emmèneriez sur une île déserte ? »

Il n'y avait pas d'autre client dans la boutique, alors j'en profitais pour monopoliser le vendeur. Le contact humain me faisait du bien. J'avais parfois, souvent, tendance à m'enfermer chez moi. Je n'étais pas très douée dans les interactions sociales. J'avais du mal à parler aux gens que je connaissais mal. Je ne me mêlais pas aux groupes. Parfois le simple fait de prendre le bus était une épreuve, parce que j'avais besoin de mon espace vital. Mais Jeremiah n'était pas un inconnu. Il était relativement aisé de lui parler. Et pouvoir discuter avec quelqu'un sans réfléchir à tout ce que j'allais dire, ça faisait du bien, ça libérait d'un poids. Je connaissais Jeremiah suffisamment bien pour savoir qu'il ne me jugerait pas trop durement.
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❝ love's in the air. ❞Dog LoveS’il y avait une chose qui me rendait heureux dans mon boulot, c’était de rendre un client heureux de mon conseil. C’était cela aussi, la musique, rendre heureux juste avec quelques notes, et des voix qui savaient sur poser sur des émotions. C’était aussi le contact avec l’autre, apprécier une discussion au rythme d’un piano, au son de rifts et sous la tutelle d’une phrase percutante. Être la perle d’Emily, c’était tout ce qu’il me fallait pour être fier comme un pinson, souriant presque jusqu’aux oreilles, quand bien même elle ne le verrait pas, elle l’entendrait dans ma réponse, comme j’avais entendu le sien :

« Tant mieux si ça vous plait, alors ! Je dois en avoir peut-être un ou deux autres en stock… Oui ! Deux. Et je pourrai en commander s’il en manque. »

J’étais en train de récupérer les CD, pour les poser sur le comptoir, à un endroit où je saurai les retrouver dès lors qu’elle voudra passer à la caisse. Et tandis que je faisais cela, je l’entendis me poser une question, après avoir souligné qu’on parlait beaucoup de ses propres goûts musicaux, mais pas des miens. Oh, hé bien il fallait dire qu’on demandait rarement au vendeur ce qu’il aimait… On partait parfois même du principe qu’il aimait tout ce qui passait dans sa boutique. Comme si j’avais réellement le temps de tout écouter ! Enfin, je ne leur en voulais pas, tant qu’ils partaient satisfaits et revenaient la fois suivante, ça m’allait.

« J’aime beaucoup de choses… Dernièrement, je suis rentré dans une période assez jazzy, blues. Voire même j’écoute des oldies, quelques valeurs sûres comme Louis Armstrong, en fait. »

J’eus un petit rire, après tout c’était tout de même appréciable de répondre, quand bien même ce fut une réponse lapidaire. En ce moment, je m’étais lancé un peu dans la recherche de nouveaux talents, sur internet, sur des forums. Ça me prenait pas mal de temps, surtout avec le logiciel qui lisait les messages au fur et à mesure, je ne pouvais pas trop écouter de musique en même temps. Un sacrifice qui le valait bien, car les représentants des maisons de disque se concentrait souvent sur leurs albums qui devaient le plus faire de chiffres… C’était bon pour le commerce, et parfois même c’était bien, mais je me disais qu’encourager le moins connu, c’était sympathique aussi. Tout comme j’avais aussi un bac spécial musicien de Bray. Ça partait moins bien, mais c’était ma contribution. Cependant, je tenais à nuancer ce que me déclara Emily, bien qu’elle n’ait pas tort, dans le fond.


« Hé bien, certains artistes ont la réputation à la hauteur de leur talent… Mais c’est vrai que parfois, je me vois vendre des CD que j’apprécie bien peu, voire que je ne connais pas du tout… Car la musique est vaste, et je n’ai qu’une vie humaine pour écouter tout ça. Enfin, tant que ça leur fait plaisir, je suppose que c’est une bonne chose, s’ils achètent ça, non ? »

C’était une vision que je m’étais composée surtout pour m’éviter de râler dès que j’entendais du mauvais rap passer dans ma chaîne hi-fi car un client voulait écouter avant d’acheter, par exemple. Mais bon, passons à autre chose, qu’est-ce que j’écoute en général… Et ce que j’emmènerais sur une île déserte ?! Quelle drôle d’idée, je n’en avais pas la moindre idée…

« Une île déserte… Argh, c’est horrible ! » Je ris un peu, c’était compliqué comme exercice tout de même.[/b] « Je pense que je serai obligé de répondre un joker, du style mon iPod… C’est vraiment terrible, d’autant que je serais un piètre survivant ! Mais allez, juste pour répondre, un Geatest de Queen, avec un petit soupçon de… de… Hum… Alle, de ABBA car il faut bien s’amuser après Freddy Mercury. Puis du Europe, histoire de se motiver à se lever chaque matin ! Ce serait une playlist assez sympathique, non ? »[/b]

Je me remis à rire, c’était assez spécial de me mettre dans la peau de Robinson Crusoé, avec malgré tout une prise électrique qui alimenterait un lecteur de CD. A moins qu’il soit à pile, et là, c’était le drame.
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Jeremiah me répondit d’une voix enjouée qu’il avait deux autres albums, et qu’il pourrait en commander. Il était de toute évidence content d’avoir fait mouche. La pointe de fierté que je décelais dans sa voix me fit sourire. Tout le monde était content. C’était bien le principal en commerce, a priori. Je hochai la tête dans un mouvement de réflexe, puis me rendis compte que ce mouvement était probablement imperceptible. J’avais encore des mouvements comme ça, qui me restaient du temps où je voyais.
« Mettez-moi les deux, je commanderai plus tard », exprimai-je alors à haute voix. Plus compréhensible pour Jeremiah. Mais il semblait déjà avoir compris, puisque les CD se posèrent délicatement sur le comptoir. J’ignorais comment il faisait pour garder de l’ordre dans sa boutique et s’y retrouver. Avec moi, c’aurait été le chaos depuis bien longtemps. Je me perdais dans la petitesse de mon bureau à la mairie. Alors une boutique entière….Mais Jeremiah semblait maitriser l’espace et il se déplaçait sans hésitation, saisissait les références. Une organisation que j’admirais. Avec peut-être une pointe d’envie.

Je ris quand il me parla de ce qu’il écoutait. Louis Armstrong ? Ce n’était pas tout récent. Un classique, assurément. Mais je m’imaginais Jeremiah plutôt dans du classique pur et dur. Beethoven, tiens, ça lui irait bien. A cheval entre le classique et le romantique. Quoique, finalement, le jazz, ça rejoignait le classique sur bien des points. Ca s’allouait juste un peu plus de liberté.

« Hé bien, certains artistes ont la réputation à la hauteur de leur talent… Mais c’est vrai que parfois, je me vois vendre des CD que j’apprécie bien peu, voire que je ne connais pas du tout… Car la musique est vaste, et je n’ai qu’une vie humaine pour écouter tout ça. Enfin, tant que ça leur fait plaisir, je suppose que c’est une bonne chose, s’ils achètent ça, non ? »
J’acquiescai avec un « mmh mmh » approbateur. C’était une bonne chose, oui. Après tout, s’ils n’achetaient pas, la boutique ne ferait pas long feu. Et ce serait dommage. Et comme le disait Jeremiah, la musique est vaste. Trop pour une seule personne. A démesure de l’humanité, en fait. Et parfois, on devait accepter de partager avec d’autres, qui eux comprenaient peut-être la beauté de ce que l’on trouvait surfait.

Et de toute évidence, Jeremiah trouvait de la beauté dans beaucoup d’artistes, car il botta en touche au premier abord à ma question. L’iPod, réponse interdite ! L’île déserte en question avait un microclimat qui désactivait les iPod. Très très rare. Mais j’étais experte. Alors il se décida à me répondre, et je ris. Oui, une playlist sympathique. Jeremiah misait sur les classiques. ABBA, c’était magnifique, intemporel. Queen aussi, dans un autre jour. Europe…comment dire….moins mon style. Mais c’était péchu. Il avait trouvé un équilibre qui, somme toute, me plaisait bien.

« Je crois que je prendrais un album Best Of de Hans Zimmer. Pour me sentir grandiose et toute petite à la fois. », dis-je dans un sourire. « Et R.E.M pour me motiver un peu, si on parle de classiques. »
Mais au fond, je serais vite lassée. J’avais besoin de nouveauté, fréquemment. Pour ne pas me dégoûter de ce que j’écoutais, de la musique.
« Vous aimez vraiment la musique, c'est très appréciable. D’ailleurs, si vous permettez…. »
Je me pinçai les lèvres, puis me lançai. Après tout, j’étais en confiance ici.
« Pourquoi avoir ouvert une boutique, si je peux me permettre ? Je veux dire, avec votre cécité, chef d’entreprise, ce n’est pas le plus facile, surtout quand vous êtes seul. Vous vous êtes mis face à un sacré challenge. »
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❝ love's in the air. ❞Dog LoveJ’appréciais de plus en plus discuter avec Emily. Elle était bien plus mature que certaines personnes que je pouvais fréquenter. Et cette question de l’île déserte avait eu le mérite de me faire réfléchir un peu, bien que j’aie fini par donner quelques titres. Et Emily donna les siens. Qui n’étaient pas bêtes au final ! Elle avait raison, il valait mieux éviter les chansons qui déprimaient, surtout sur une île déserte où on souffrirait de la solitude. R.E.M. aura le mérite de donner envie de danser tout seul – ce qui était pratique, car je n’aimais absolument pas l’idée d’être observé tandis que je faisais quelques timides pas de danse. J’étais un homme pudique, qui n’avait pas été élevé pour pouvoir danser. Mis à part quelques danses lors de fêtes particulières, et encore, j’étais bien trop jeune pour m’y intéresser et mes parents étaient de ces gens très ternes, sans couleur. Même la musique n’était pas particulièrement bien vue dans mon entourage familial. Je m’étais réellement ouvert à ces sonorités lorsque j’avais fini par quitter ma famille, après leur tentative d’exorcisme sur moi… Car ouais, ce qui était en réalité des visions, ils étaient parvenus à me faire croire que j’avais le démon en moi.

Heureusement que mes visions ont fini par me mener à la fois vers le Dux Tenebris qui m’ont dit ce qu’il en était réellement, et vers Leon qui avait achevé de me rassurer sur le fait que je n’étais pas fou. Et la musique… La musique, et la découverte de mon oreille absolue, tout cela m’avait redonné vie. Simplement, certaines choses restaient, l’éduction était marquée au fer rouge, quand bien même on voudrait les rejeter. Alors, je pouvais avoir R.E.M. dans les oreilles, et me contenter pour autant de faire taper du pied. Doucement, mais en rythme. Avec un petit sourire en coin aussi.

Je fis donc un petit sifflement admiratif quant à sa liste de choix.

« Je suppose que je devrais vous emmener avec moi sur l’île déserte, à nous deux, on pourra s’amuser un peu, musicalement parlant. »

Une petite plaisanterie, juste avant d’écouter sa question. Car visiblement, elle était très curieuse sur le fait que j’étais devenu chef d’entreprise, malgré ma cécité. Oh… Hé bien, la réponse était assez simple. Pour y répondre, je m’accoudai à mon comptoir, et je commençai :

« Avant tout… Je ne suis pas tout seul, en réalité. Mon mari, Leon, est co-propriétaire avec moi. Même si entre nous… C’est moi le chef, le vrai. Et cette boutique, je la voulais avant même de devenir aveugle. J’ai fait des études de commerce, vous savez ? »

Je me souvenais encore de cette période, ce ne fut pas tout de suite très simple. J’avais rencontré Leon juste après une petite période de césure où j’avais voyagé, avec un simple sac à dos, avant de ne plus être capable de voir le monde. Et puis, j’avais travaillé dans des bureaux, des emplois à ma mesure en quelques sortes… Des emplois faciles, alors que je fourmillais de musique.

« Nous avons vécu un temps à Londres, avec Leon. Puis, nous avons voulu quitter la grande ville, nous mettre un peu au vert… Bray avait un local de libre, avec un super appartement au-dessus. Et nous voilà ! »

J’avais le sourire aux lèvres, bien que je ne disse pas vraiment tout. Toujours ma pudeur… J’appréciais beaucoup Emily, simplement, j’avais toujours tendance à vouloir cacher le négatif, ce qui me faisait peur. J’étais de ces personnes qui n’osaient pas dire ce qui n’allaient pas, il fallait m’arracher les vers du nez, comme le faisait Leon quand il sentait que j’étais renfrogné. Enfin, je n’allais pas embêter un soleil comme Emily avec mes ennuis. Car la vérité, c’était que Leon était fatigué par sa maladie, et pour le préserver encore longtemps, j’avais voulu qu’il coupe les ponts avec tout ce qui était toxique : le travail, les fêtes où « trop » était le maître mot… Enfin. A Bray, c’était plus tranquille.

« Et puis… C’est un challenge, mais j’aime ça. J’aime l’idée que je suis indépendant, même si, avouons-le, cela ne fait que sept ans que je suis aveugle… J’arrive encore à me planter. Au moins, j’ai trouvé de quoi m’aider, n’est-ce pas ? Avec cette machine qui fait des étiquettes imprimées ET en braille… Magnifique bête. »

Puis je finis par lui retourner la question après tout. C’était cela une discussion : échanger :

« Et toi ? Ton arrivée à Bray, tout se passe bien ? »
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« Je suppose que je devrais vous emmener avec moi sur l’île déserte, à nous deux, on pourra s’amuser un peu, musicalement parlant. »
« Mais si vous m’emmenez, ce n’est plus une île déserte, ce serait de la triche » ajouté-je en riant légèrement. Jeremiah semblait se décoincer un peu plus à chacune de nos conversations. Et moi aussi, je me décoinçais. Les relations interpersonnelles n’étaient pas mon fort. J’avais trop d’insécurités. Toujours le mot de travers, la peur de déranger. Et puis, l’absence de contact visuel n’aidait pas. Ma cécité faisait peur aux gens, parfois, à ceux qui ne me connaissaient pas bien. Ca n’aidait pas à forger des relations, quand on sentait que la personne en face marchait sur des œufs. Mais je n’avais pas ce problème avec Jeremiah. On pouvait discuter librement, et nous n’avions pas ce problème de « oh zut, j’avais oublié que tu ne pouvais pas voir ». Ca libérait d’un certain poids.

Il m’expliqua son quotidien de chef d’entreprise. Qu’il partageait avec Leon, évidemment. Quand on y pensait…abandonner une carrière de procureur pour devenir propriétaire d’un magasin de musique. C’était une belle histoire, à mon avis. Parce que c’était une histoire d’amour. J’appris dans le même temps que Jeremiah n’avait pas toujours été aveugle. Mon empathie n’en fut que plus grande. Parce que je savais ce que c’était, de ne plus voir un jour. Je connaissais le manque, la détresse, l’incompréhension. Je ne dis rien, par pudeur, par timidité, parce que je n’avais pas spécialement envie d’en parler et je n’étais pas sûre que Jeremiah soit prêt à en parler non plus.

C’est drôle, les James avaient eu un parcours un peu inverse du mien. J’avais quitté Bray pour la ville. J’avais adoré Detroit, le fourmillement. J’évitais la foule, mais j’aimais sentir la vie. Ici, c’était trop calme. Trop au vert.
« Et puis… C’est un challenge, mais j’aime ça. J’aime l’idée que je suis indépendant, même si, avouons-le, cela ne fait que sept ans que je suis aveugle… J’arrive encore à me planter. Au moins, j’ai trouvé de quoi m’aider, n’est-ce pas ? Avec cette machine qui fait des étiquettes imprimées ET en braille… Magnifique bête. »
Je ris doucement. La technologie était en effet formidable. Elle facilitait la vie des gens comme nous. J’avais une machine à la maison qui imprimait des étiquettes en braille. Mon ordinateur lisait ce qui était écrit sur mon écran. Beaucoup de choses étaient faites pour qu’on ait une vie plus simple. Ca ne remplaçait pas nos yeux. Ca ne remplaçait pas notre vie d’avant, mais c’était déjà ça.

« Et toi ? Ton arrivée à Bray, tout se passe bien ? »
Je notai le passage au tutoiement, mais ne dis rien. Après tout, c’était aussi plus simple.
« Je ne suis pas vraiment là par choix… », dis-je doucement en haussant les épaules. « Ma mère est malade, je l’aide comme je peux. C’est juste…pas évident parfois. Mais on fait avec. Je me fais ma place. Je repartirai peut-être un jour. »
Woody aboya un coup, comme s’il protestait. Lui aimait Bray. Il avait toujours aimé Bray. Et il n’avait jamais vraiment apprécié Detroit, je le savais, je l’avais senti dès que nous avions emménagé là-bas. Je ris doucement.
« Ou alors monsieur Woody m’obligera à rester ici. Bien, je ne vais pas vous embêter plus longtemps, je dois passer voir ma mère, elle va s’inquiéter. Merci encore pour tout Jeremiah. Je repasserai bientôt, en espérant que nos chiens calment leurs ardeurs. »
J’hésitai quelques secondes, puis me lançai à l’eau.
« Passez le bonjour à votre mari. Vous savez….vous devriez venir à l’appartement, un jour. Dîner. On aurait vraiment le temps de discuter. Enfin, comme vous voulez. »
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Dog Love - Jeremiah&Emily
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