the walking dead + casius

Depuis quelques semaines, la relation entre ta femme et toi a nettement pris un tournant. Tu lui as tout raconté et malgré ça elle est restée. Parce qu'elle est plus forte et plus intelligente que tu ne le pensais de base, sans aucun doute, parce qu'il ne s'agit désormais plus vraiment de vous deux mais de l'être qui grandit en elle, aussi et surtout. Elle sait pertinemment qu'elle risque de ne plus jamais voir son mari en dehors d'une prison sinistre, mais elle est là, toujours. Trop tard pour faire machine arrière, les mots prononcés sur le ton du mensonge étaient pourtant bien loin de ça. Mariés pour le meilleur et pour le pire, il semblerait que votre truc soit plutôt dans la deuxième catégorie, mais ce n'est pas encore suffisant pour la pousser à faire ses valises. Elle pourrait retourner en France, laisser s'échapper tout ce qu'elle a bâti ici, mais c'est pour toi qu'elle reste, qu'elle fait tous ces efforts. En contrepartie, t'as promis que quoiqu'il arrive tu l'accompagneras autant que possible, surtout les prochains mois, malgré le fait que tu restes persuadé que tu seras pas en liberté pour la voir accoucher. Étrangement, c'est en ce moment que vous ressemblez vraiment à un couple, alors que vous avez jamais été aussi loin de votre idéal de vie. Comme quoi l'univers ne manque jamais d'ironie. Tu te libères de plus en plus souvent du boulot pour pouvoir l'accompagner lors des rendez-vous médicaux, nombreux. Bien sûr, la plupart du temps, comme aujourd'hui, tu restes devant la porte en attendant qu'elle sorte. Les rendez-vous gynécologiques ça n'a jamais été vraiment ton truc, faut bien l'avouer. Surtout pas pour regarder un médecin certifié tripoter ta femme. Tu l'as fait une fois, et le malaise que t'as ressenti n'a fait qu'énerver Anthéa. Alors c'était décidé, tu n'iras qu'aux échographies, point barre. Assis sur une chaise on ne peut plus inconfortable, tu te contentes d'observer les gens passant autour de toi. Le plus souvent des femmes, des patientes, parfois accompagné d'un membre du corps médical. Ou alors, dans certains cas, des maris, des compagnons dans le même état que toi, avec qui t'échanges un regard compatissant. Comme si vous étiez dans la même galère alors que tu rêverais sans doute d'être à leur place. A certains moments tu regardes ta montre, ton téléphone étant éteint. Mais l'heure ne semble pas avancer, si tu étais des plus dramatiques, sans doute que tu te dirais que parfois elle semble reculer, même. Tu bouges sans cesse sur ton siège, tentant de trouver une position plus agréable, mais sans succès. T'as la bougeotte, ça a toujours été le cas, toi le gamin hyperactif. T'arrives pas à te sortir de la tête qu'il faut que tu fasses quelque chose pour ne pas devenir fou. Tu en viens à compter les carreaux du plafond, puis tu t'en désintéresses, comme un gosse.

Puis, délivrance, ton estomac qui grogne. Tu manges une fois quand t'as le temps, alors forcément, ça allait finir par arriver, le corps qui appelle à l'aide. Mais cette fois, tu peux y remédier, t'attends même que ça. Tu te lèves presque trop précipitamment, hésites quelque seconde devant la porte du gynécologue, pour être certain qu'Anthéa ne va pas la passer dans les deux prochaines secondes, puis comme ce n'est pas le cas, te dirige d'un pas sûr vers l'ascenseur. T'as vu des distributeurs en arrivant, ce sera sans doute là que tu pourras trouver de quoi te restaurer, un paquet de chips, un sandwich, n'importe quoi. Tu devrais pas t'absenter trop longtemps, sinon tu risques de te prendre les foudres d'une femme enceinte, et c'est pas très bon pour toi. Mais tes inquiétudes, qui semblent si minimes comparées à celles que tu pouvais avoir, s'évanouissent quand tu observes l'homme dans l'ascenseur. Tu mets quelques secondes à le reconnaître. Pourtant c'est toi qui a fait tes recherches, toi qui a enquêté sur lui, toi qui a décidé d'imprimer son visage dans ton esprit pour avoir le plus de chances possibles de le retrouver. Mais il semble différent de la photographie que tu as prise comme point de repère. Plus abîmé, plus mort, presque. Tu n'y crois pas, pendant une seconde. Comme un signe du destin, ou le hasard qui se fout légèrement de ta gueule. « Sirius Brown ?» Une formalité toute simple, quoiqu'il te réponde de toute manière tu sais qui tu as en face de toi. Cette nouvelle lubie qui t'a pris. Retrouver celui qui avait échoué à tuer ton père, mais qui s'en était rapproché assez pour que tu en sois admiratif. Beaucoup ont essayé, personne n'a jamais marqué. Et tu savais, au fond, que si tu devais le retrouver, ce serait grâce à celui qui se trouve maintenant en face de toi.