Sio ♠ le destin est une invention après coup

Mes parents m'ont appelé Siobhan Carmody ! Je suis né le 21 mars 1993 à Bray, en Irlande, contrée que je n'ai jamais quitté de toute ma vie. Je suis un élément de 23 ans. Pour plus de précisions, je suis bisexuelle et présentement fiancée, bientôt mariée à Castiel.. Je suis fier de dire que je travaille en tant qu'étudiante en droit, ça m'aide à payer mes factures. Je suis d'ailleurs plutôt riche, grâce à mes parents. On me dit souvent que je ressemble à Britt Robertson, mais en mieux, quand même. Une dernière chose, je fais partie du groupe des êtres de l'eau, et plus précisément je suis la petite Sirène.

Carmody était un nom que j’avais toujours été fière de porter. Ancrée au fonds de mon être, de ce que j’étais, c’était mon essence même, ma vie, mon cœur. Fille unique choyée et aimée par des parents presque parfaits – bon dieu le cadre idyllique du truc – comment refuser ? Comment refuser devant les yeux brillants de ma mère ? « Ma chérie, on a enfin trouvé ton parti. » Parfois les enfants ont quelques espoirs, que les promesses des parents s’évanouissent dans les airs, qu’ils oublient subitement ce pour quoi ils vous élèvent depuis votre plus tendre enfance. Mais les Carmody n’avaient pas oublié, non, loin de là. J’avais vingt-deux ans et le couperet tombait sur moi. « C’est un magnifique jeune homme, très haut placé, un parti parfait pour ma petite perle précieuse. » Ca faisait presque vingt-deux ans qu’on me préparait pour cette nouvelle, pour ce choix, pour cette union, alors c’était presque devenu comme une partie de mon être : ma fille, tu n’épouseras pas l’homme qui te plait. Quand je lisais des romans à l’eau de rose, quand je regardais des films d’amour, c’était toujours ça, ce sentiment clef qui régnait. L’amour. Tout abandonner pour lui, tout lâcher pour lui, tout faire pour lui, les yeux fermés. Mais le souci était un peu différent ici : je n’étais pas amoureuse et je ne savais même pas si je le serais un jour.

Pour être honnête, lorsque mes parents m’avaient annoncé la nouvelle, l’idée d’avoir Castiel pour mari ne m’avait pas… rebutée. C’était un beau garçon, et même s’il avait la fâcheuse tendance, selon les rumeurs, de se taper toute la ville, il avait l’air gentil. Non, le problème est venu après. On croit que les autres ont une force de caractère aussi vaillante que la vôtre. Castiel se trouvait être irritable, désagréable. L’idée de m’épouser ne lui plaisait apparemment pas. Oh, il m’emmenait en sortie, il me voyait régulièrement, mais la moindre petite chose que je disais, la moindre allusion au mariage futur, la moindre petite pic… Cas n’avait pas son pareil pour hurler – mais j’étais fille unique, moi aussi je savais hausser le ton. C’est après ces innombrables disputes que l’idée de me marier était presque devenue insupportable : je ne voulais pas d’un quotidien de rage et de désarroi. Il ne voulait pas m’épouser ? J’étais trop laide pour ses petits yeux ? Qu’il annule le mariage alors, ou qu’il arrête d’être cette victime égoïste qui voulait blesser tout le monde.

Le courroux et le jugement étaient deux qualités que je possédais aussi. C’était pour cette raison que j’avais voulu m’embarquer dans des études de droit. Je voulais devenir juge ; pas pour tenir la vie entre mes mains, car je trouvais que c’était un don trop important pour une seule personne, mais parce qu’une petite partie de moi voulait défendre la veuve et l’orphelin. Mes parents auraient voulu que je les rejoigne au sein de leur journal – d’où ils tiraient la plupart de leur fortune – mais avoir une étudiante en droit dans la famille était quelque chose d’assez prestigieux pour les convaincre. Mes parents étaient très à cheval sur les valeurs, la famille mais au fond ils étaient des personnes aimantes, qui avaient à cœur mon bonheur. Pour eux, me marier au meilleur parti de la ville était la meilleure façon de me protéger du futur – peut-être parce que c’est ce qu’on leur avait inculqué depuis la nuit de temps. Je me demandais si un jour cette tradition cesserait. En tout cas, ce ne serait pas avec moi que ça commencerait.

Outre cet état de fait, ma vie avait été des plus banales. Je n’avais jamais voyagé et j’espérais que mon futur mariage me le permettrait un jour, c’était peut-être la seule chose qui me manquait. Je passais mes journées à regarder des films ou à dessiner des trucs sans queue ni tête. Je n’avais jamais été une très bonne étudiante particulièrement, mais ça l’avait toujours fait sans me fouler. Seules mes études actuelles, qui arrivaient d’ailleurs bientôt à leur terme, avaient su me charmer et me faire travailler. J’habitais toujours chez mes parents, mais bientôt avec le mariage… Je ne pouvais m’empêcher de regarder cette chambre dans laquelle j’avais vécu toutes ces années, me demandant comment serait ma future vie… Si Castiel n’annulait pas le mariage, bien sûr. Ils avaient quelques têtes brûlées dans cette famille. Ce serait alors le premier déménagement que j’aurais à faire.

Par rapport à ma situation de sirène… Eh bien, ce n’était pas spécialement un don qui m’importait vraiment. Oh, j’étais extrêmement fière d’en être une, et c’était d’ailleurs pour cela que j’avais intégré le Parti Triton, afin de démontrer notre supériorité. Mais j’appréciais tout particulièrement ma forme humanoïde, et de ne pas pouvoir nager comme un humain était une curiosité que je ne connaîtrais jamais. On disait souvent que les enfants uniques voulaient toujours ce qu’ils n’avaient pas. C’était peut-être ça, ouais.
Prochaine bataille : l’amour ou en tout cas le respect de Castiel.
Ca allait pas être de la tarte.