My name is blurry face and I care what you think (Naël)

Naël ∞ Jean-Charly

C'était un dimanche comme un autre, pas plus calme, pas plus bruyant. En réalité, il n'avait rien de différent, il faisait beau, un peu frais, sans doute quelques nuages de trop mais on pouvait facilement faire avec. Jean avait décidé, comme tous les dimanches depuis deux ans, d'aller s'occuper de Phoebus, et de faire une promenade. C'était son activité favorite les jours où elle ne travaillait pas, et s'occuper de son cheval elle-même était la chose qui lui tenait le plus à coeur, elle détestait ne pas pouvoir être là tous les jours. Mais rien n'était simple, il n'y avait pas d'écurie à Bray, et chaque voyage qu'elle faisait était interminable, ne pouvant en aucun cas prendre une voiture. Une route qui se serait avérée courte et possible à faire tous les jours mettait cinq fois plus de temps dans sa condition. Comme tous les dimanches, la jeune femme avait pris le train, car elle ne le craignait pas. Elle ne savait pas pourquoi, il y avait autant d'accidents de train qu'il pouvait y avoir d'accidents de voiture, mais ce n'était pas en train qu'elle avait failli se tuer. C'était là tout le problème. La gare la plus proche de l'écurie était celle de Dun Laoghaire. A partir de là, il lui suffisait de marcher une heure et demie en dehors de la ville pour arriver au centre équestre où était gardé son cheval. Chaque semaine, elle faisait le parcours, ne le voyant pas comme une obligation, une plaie, mais comme une bonne sortie lui permettant de profiter de la nature. Lorsqu'Adrian le pouvait, il aimait d'ailleurs beaucoup l'accompagner, c'était quelque chose qui lui plaisait, mais aujourd'hui, il avait apparemment quelques devoir à rattraper qui l'avaient obligé à rester à la maison.

Jean, de toute manière, n'était pas le genre de personnes à fuir la solitude. Elle n'aimait pas cela particulièrement, mais contrairement à beaucoup, elle n'en avait pas peur. Elle n'avait pas non plus besoin de musique, le calme et les bruits alentours l'apaisaient assez pour ne pas chercher confort ailleurs. En marchant, elle repensa à l'entrevue qu'elle avait eu avec Isleen, à son travail, à ses clients, tous plus atypiques les uns que les autres, laissant dériver son regard sur les fleurs qui poussaient ça et là. Naël lui avait dit qu'il la rejoindrait en début d'après-midi. Il devait d'ailleurs être aux alentours de onze heures lorsqu'elle franchit le portail qui annonçait l'ouverture du centre. Tant mieux, ça lui laissait assez de temps. Saluant les personnes qu'elle croisait avec un grand sourire, elle se dirigea d'emblée vers les écuries, mais le box qui contenait d'ordinaire son cheval était vide. Alors qu'elle s'apprêtait à aller voir à l'accueil, elle croisa l'une des habituées qu'elle connaissait assez bien. "Phoebus est dans le pré, on a pensé que ça lui ferait du bien de prendre l'air !" Jean acquiesça tout en grimaçant de manière assez comique. "Il va être propre encore !" Tout en riant, elle finit toutefois par rejoindre son cheval.

La brune resta une bonne dizaine de minutes à observer Phoebus galoper et se rouler dans la terre, sa belle robe noire entachée maintenant de traces de boue, avant de se décider à franchir les barrières pour le rejoindre. Elle avait énormément de chance de l'avoir, c'était un fait. Elle n'en revenait pas de ce cadeau, même deux ans après. Un cheval, ce n'était pas rien, c'était cher, et l'entretenir l'était encore plus. Quand certains avaient des chats, elle, elle avait son cheval. Après lui avoir passé de quoi le ramener au box, elle profita qu'il ait retrouvé son calme pour lui montrer à quel point elle était heureuse de le revoir. Et enfin, elle l'emmena. Il lui faudrait bien une heure pour qu'il ressemble à un cheval décent et soigné, mais ce n'était pas vraiment ce qui lui faisait peur.