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 Un jour mon prince (pas charmant) viendraaa (Basil]

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Charlie ó Banríon
Charlie ó Banríon
MESSAGES : 83
AGE DU PERSONNAGE : 29
RACE : Fée
MÉTIER/ÉTUDE : Femme de chambre au Dragon Hotel (larbin marche aussi...)


BASIL & CHARLIE

UN JOUR MON PRINCE (PAS CHARMANT) VIENDRAAA



Avec un profond soupire, Charlie claqua la porte de l'appartement avec son talon puis retira sa veste et ses chaussures qu'elle laissa choir parterre. Journée de merde ! Ce qu'elle détestait travailler dans ce trou à rats qu'était le Dragon Hôtel ! Ca puait et le propriétaire était un con fini doublé d'un esclavagiste, triplé d'un macho sexiste et quadruplé d'un... d'un... d'un con ! Oui elle l'avait déjà dit, mais c'était encore plus vrai que la première fois !
La fée resta un instant adossée à contempler l'appartement. C'était beaucoup trop grand ici... Beaucoup trop pour elle... Elle avait beau faire de son mieux pour maintenir les lieux en état, elle voyait bien que tout se détériorait petit à petit. Cet endroit était un gouffre financier et elle n'avait pas la moindre idée de quoi faire de plus pour s'en sortir. Elle cumulait déjà plusieurs travail et la seule raison pour laquelle les créanciers ne les avaient pas encore mises à la porte sa mère et elle, c'était tout simplement parce que lorsqu'elle recevait leur visite, Charlie usait de sa poussière pour les faire déguerpir et faire en sorte qu'ils ne reviennent pas de si tôt.    
La solution aurait été de déménager pour quelque chose de plus modeste mais sa mère allait déjà assez mal comme ça... La jeune femme ne pouvait pas risquer d'aggraver son état en la changeant d'environnement... Il ne restait que quelques bribes de sa maman et elle avait peur de les voir disparaître si elle l'éloigner de l'appartement familial. Ici de temps en temps, elle avait quelques moments de lucidités dans ses meilleurs jours. Mais si elle l'emmenait ailleurs, Charlie craignait de la perdre pour de bon. Hors elle ne pouvait pas s'y résoudre. Il lui restait déjà si peu de choses ! Elle se raccrochait à ce qu'elle pouvait du très peu que lui donnait sa mère perdue depuis bien trop longtemps dans les méandres de sa mélancolie destructrice.

Charlie alla lui dire bonjour et s'assurer qu'elle allait bien, qu'elle ne manquait de rien. Comme très souvent, elle n'avait pas bougé du fauteuil où elle l'avait laissé ce main qui faisait face aux nombreuses photos de son père. La fée toucha ses mains afin de vérifier qu'elle n'avait pas froid, puis récupéra la tasse de thé que sa mère avait du se préparer consciemment ou non à un moment dans la journée avant d'aller lui en préparer un autre bien chaud.

- Je vais prendre une douche ok ? T'appelle si t'as besoin.

Elle ne s'attendait pas à la moindre réponse,  mais elle continuait de se bercer de l'illusion de leur relation. Parfois, sa maman hochait la tête ou lui adressait un véritable regard, comme si elle remarquait enfin sa présence. Dans de très rares moments, elle lui parlait mais c'était comme si elle était bloquée 20 ans plus tôt dans le passé, à l'époque où Charlie n'était encore qu'une enfant de 5 ans et que son père était encore parmi elles. C'étaient à la fois des instants cruels et heureux car durant quelques minutes, elle avait la sensation d'exister à nouveau dans les yeux de sa mère. De ne plus être oubliée. Avant que la réalité ne la rattrape et ne la replonge dans sa solitude.

- Basil.
- Basil ? C'est qui Basil. Tu parles de quoi maman ? Maman ?


Charlie soupira et se redressa. Elle était déjà à nouveau partie dans une conversation avec ses photographies à l'effigie de son mari... La fée l'abandonna et fila à la salle de bain. Elle répondit aux textos qu'elle échangeait avec Wyatt depuis qu'elle était montée dans le bus pour rentrer chez elle et regarda la photo de son fond d'écran les représentant tous deux au cinéma, un sourire tendre à ses lèvres. Elle détestait qu'ils se voient de moins en moins à cause de ce qui se passait dans sa famille ! Elle avait de la peine pour lui bien sûr car elle n'aimait pas le voir aussi soucieux et torturé, mais elle aimait encore moins le fait qu'il se rapproche des Jones. C'était elle qui avait été là pour lui quand Sarah était morte ! C'était elle qui l'avait soutenu et l'avait aidé alors que les autres l'avaient blâmé ! Ils avaient eu beau ne pas dire clairement les choses, c'était évident qu'ils le tenaient pour responsable de sa disparition ! Ils le prouvaient en voulant le laisser à l'écart des recherches des jumeaux.
Comme si il ne s'en voulait pas tout seul assez comme ça... Il allait falloir qu'elle redouble d'efforts pour le ramener à elle et l'éloigner d'eux. Pour son bien... Il n'y avait qu'elle qui savait l'aimer comme il le méritait.

Charlie se libéra de ses vêtements qu'elle jeta dans la panière de linge sale qui débordait presque. Il faudrait qu'elle fasse une lessive en douce chez Maxwell lorsqu'elle irait y faire ses heures de ménage ! Sans ce faire choper cette fois...
Elle matérialisa ses ailes qu'elle aimait sortir lorsqu'elle se retrouvait seule et en observa les reflets dans le miroir. Elle n'en avait plus honte aujourd'hui. Elle les avait acceptées. Il y avait eu un temps où elle les avait tant méprisé... Où à cause d'elles, Charlie s'était crue une abomination. Une erreur de la nature. Une anomalie. Elle avait si souvent souhaité être humaine et les voir disparaître, quitte à se les arracher elle-même !
Jusqu'à Wyatt. Le sorcier lui avait donné une place dans ce monde qu'elle ne comprenait pas et dont elle s'était toujours sentie en marge. Il lui avait révélé qu'elle n'était pas toute seule à être différente et surtout, il aimait ses ailes. Il n'avait pas reculé ni été effrayé ou dégoûté en les voyant. Il lui avait dit qu'elles étaient belles, avec leurs nuances de bleus et violets iridescentes. Qu'ELLE était belle...

La fée entra sous la douche et laissa l'eau chaude venir la réchauffer et caresser ses courbes. Bon sang ce que ça faisait du bien ! Elle avait la sensation que le jet la lavait de tout ce qu'elle avait du supporter tout au long de cette fichue journée ! Elle se délassait et se libérait. Elle savait qu'elle ne devait pas rester trop longtemps sous l'eau car il n'y avait pas de petites économies mais elle avait besoin d'un moment là. Elle ferait plus court demain...

- Basil... murmura-t-elle en repoussant ses cheveux en arrière.

C'était qui ce Basil ? Pourquoi est-ce que sa mère avait prononcé ce prénom ? Charlie ne connaissait pas de Basil en de hors de la souris dans le dessin animé Disney !
Ou... si...?  
Elle avait déjà entendu ce prénom mais ça remontait à une autre vie. Elle était d'ailleurs surprise de s'en souvenir encore étant donné qu'elle n'y avait jamais repensé avant aujourd'hui... Les traits des visages étaient flous mais... elle se rappelait qu'il y avait eu ce jour où on l'avait habillé comme une véritable petite princesse, tirée à quatre épingles. Sa mère lui avait dit 20 fois qu'elle allait devoir bien se comporter, ce qui avait fait sourire son père qui connaissait le tempérament fougueux de sa petite fille qui peinait souvent à se canaliser tant elle avait de curiosité pour ce monde et d'énergie à revendre.
Son regard perdue dans le passé, Charlie laissait les images lui revenir sans chercher à les repousser. Elle revoyait l'imposante façade de la demeure où ils s'étaient rendus qui lui avait paru si grande qu'elle avait été incapable d'en voir la fin dressée vers le ciel. Elle se souvenait avoir été assise sur un canapé pendant que ses parents discutaient avec d'autres adultes qui l'avaient observé sous toutes les coutures. Elle avait été ravie également qu'on l'autorise à user de ses pouvoirs autant qu'elle le voulait et même qu'on l'y encourage ! D'habitude ses parents la réprimandaient toujours lorsqu'elle faisait ça en public ! Tout le monde avait eu l'air ravi du spectacle qu'elle donnait.
Mais elle était encore petite et avait fini par s'ennuyer, trouvant le temps trop long. Les adultes ne s'occupaient plus d'elles, tout à leurs affaires. Elle avait cherché à attirer l'attention deux trois fois mais voyant qu'elle n'y arrivait pas, elle s'était éclipsée pour aller explorer les lieux tout en jouant avec sa magie, jusqu'à tomber sur un homme bien plus grand qu'elle, que la petite fille avait regardé mi fascinée mi intriguée avant de lui demander avec son aplomb naturel pourquoi il avait les cheveux oranges...

Le reste demeurait très vague. Elle se rappelait juste que le soir dans son lit une fois bordée, sa maman lui avait raconté une histoire différente de celles qu'elle avait l'habitude de lui conter une fois couchée. Elle lui avait parlé d'un prince, Basil, d'une princesse, Charlie, qui un jour se marieraient pour le bien de leur lignée. L'enfant avait rit, amusée de se retrouver au cœur d'une histoire pareil, mais sa mère avait insisté, sérieuse malgré son sourire tendre et fier.
Dans la famille à laquelle appartenait la petite fille, le sang mêlé n'existait pas. Elle était le parfait résultat d'une union de deux familles au sang pur. D'aussi loin que ses origines remontaient, que ce fut du côté de son père ou de sa mère, jamais aucun humain n'était venu s'immiscer dans l'arbre généalogique et souiller le sang des fées de son "impureté". Dans ces deux illustres familles on s'accouplait inter espèce et tout manquement à la règle n'était même pas envisageable. Ce n'était pas l'influence ni l'argent qui faisait leur rang mais la pureté de leur sang. Des êtres comme eux étaient rares, si ce n'était uniques car si les fées existaient bel et bien, les humains eux pullulaient en nombre et il était de plus en plus difficile à mesures du temps qui passait de ne pas voir venir un humain se greffer sur l'échiquier de la génétique. La noblesse des fées différait de celle des traditions humaines. Ce n'était pas une question de titre, mais d'essence et de force de pouvoirs. De sang. Celui de Charlie était rare. Sa magie était brute. Si brute qu'elle peinait parfois à la maîtriser.

- Y'a quelqu'un ? se retourna-t-elle en sentant comme une présence l'observer, sortant brutalement de ses pensées.

Elle arrêta l'eau. Non mais n'importe quoi. Elle était ridicule. Qui aurait pu être là franchement ?
Un fantôme ?


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Basil Egerton
Basil Egerton
MESSAGES : 3959
AGE DU PERSONNAGE : 49
RACE : Fantôme (ex-fée)
MÉTIER/ÉTUDE : Gardien du cimetière

Paupières closes, tu peux voir ton esprit se déliter. Il t’est difficile pourtant de poser des mots sur le phénomène. Tu peux te représenter, par exemple, le sous-sol de ton ancienne demeure, tout aménagé par tes soins ; tu te souviens de l’odeur de renfermé de par l’absence de fenêtre, des rideaux tirés comme pour délimiter plusieurs pièces. Les amoncellements de boîtes en métal, les bâches plastifiées à ne plus savoir quoi en faire, l’entassement sur les étagères et la table aux bords creusés, l’outillage chirurgical et les relents de désinfectant. Des heures, des jours que tu passais autrefois dans ce décor, tu te le représentais avec exactitude mais désormais terne et inanimé ; pour une raison inexplicable, tu ne parvenais plus à y associer d’événements ou d’émotions et de moins en moins chaque jour passant. Tu te souvenais des faits bien sûr. De l’emplacement où chaque chose était rangée, du contenu de ces classeurs et débarras de papiers griffonnés à l’encre bleue. Tu te souvenais des corps, des expériences, des découpes expertes et des raisons que tu te donnais pour y procéder, mais c’était comme raconter une photographie, répéter une histoire entendue sans que tu ne parviennes à t’y associer. Et ce n’était pas tout à fait un phénomène nouveau. Tu n’avais jamais été un homme de projection, n’existant jamais que dans l’instant présent. Les souvenirs, plutôt qu’un refuge susceptible de t’apporter confort et inspiration, étaient des interventions mnésiques indésirables, rarement utiles, plus souvent des entraves stimulant la nausée, la rancœur et la frustration. Mais les souvenirs, dans un monde où tu n’étais plus capable d’existence et d’action, devenaient aussi les seules reliques de ton identité, et tu en arrivais à ce point où l’impuissance de chaque instant devenait un gouffre à remplir de tout ce que tu pouvais ressasser pour te donner de la substance.

Tu ouvres les yeux sur le crépi vieilli d’une façade éteinte, et le nez levé tu restes planté debout. Tu passes ton regard de fenêtre en fenêtre sur les étages, semblant espérer que l’une d’elles te saute aux yeux sans pour autant savoir ce que tu cherches. Hésitant. Tu appréhendes, quoi que tu ne saurais l’expliquer toi-même. Il faut bien admettre que tu n’es pas là par plaisir, mais pour la curiosité vissée à tes viscères et ce sentiment d’incomplétude. Pour un souvenir, lointain mais pas tant, dont tu veux te guérir, et que tu associes à ta mère et ses caprices. Son flot incessant de critiques venimeuses ranime dans ton ventre comme une tempête de bile et te provoque un frisson de dégoût. Même après ta mort, tu as l’impression de suivre ses consignes contre ta propre volonté, de lui donner une victoire par le seul fait de penser encore à elle et ses exigences, et ça te rend amer.
C’est qu’elle avait cette lubie persistante de te faire épouser quelqu’un. Pas pour toi mais pour le nom, pour le titre, pour le sang, pour la race ; pour ta malchance d’être né le seul garçon de ta famille, dans une famille d’illuminés qui décidait de se soucier de ces choses-là. Pour être franc tu te moquais bien de la victime désignée, qui n’était finalement pas moins victime que toi, mais l’idée du mariage te donnait de l’urticaire et tu avais soigneusement évité de croiser son chemin toute ta vie depuis que tu avais pris le large de l’influence de ta mère. Ou plutôt tenté de prendre le large. Un évitement qui s’était accompagné d’une vie de luxure et de débauche, d’expériences côtoyant l’illégalité de près, utilisant l’image de ta mère par seul souhait de l’humilier dans ton petit théâtre mental. Une vie de crime, de passion et d’obsession, de frustration s’étant mue en empilements de carcasses, pourchassant un idéal de plénitude, en vain. Elle décidait, et tu entreprenais l’exact contraire dans ton interprétation la plus infâme par rejet d’elle. Tu l’avais fuie mais elle était dans ton ombre et tu la voyais partout. Même à présent que tu étais mort et que tu n’avais rien d’autre à faire que de tourner la page, tu avais envie de savoir ce qu’elle avait voulu de toi. Tu avais la curiosité de ce à quoi tu avais échappé de justesse, ou de cette opportunité manquée pour un projet plus vaste peut-être. Tu n’y allais pas sans mauvaise intention, des idées funestes toutes orientées vers cette épouse imposée pour ce qu’elle représentait ; pourtant c’était encore répondre aux ordres comme un chien, accorder une victoire à cette femme qui était le prisme à travers lequel tu regardais toutes les autres, et qui conditionnait encore trop de tes réactions. Celle pour qui tu préférerais t’arracher la langue plutôt que d’un jour l’appeler maman, et qui te survivait encore comme un nuisible festoyant sur ta mort-aux-rats, à travers toutes les menaces assassines que tu lui avais susurré en autant d’années de haine.

Un coup d’œil sur les passants s’attarde à chercher une opportunité offerte pour changer ton programme, mais rien n’y fait quand le monde te passe au travers sans te remarquer. Quoique résolu, tu es fébrile quand tu montes jusqu’à l’appartement. Tu n’avais pas eu de mal à remonter sa trace, c’était un prérequis des activités de ton vivant que de savoir comment s’informer avec discrétion. Le nom de famille sur la boite aux lettres t’apporte hélas confirmation et te ramène à des pensées peu plaisantes. Rien que la voix irritable de ta mère qui te répète d’être un homme pour une fois et penser à ton avenir, claque que tu es sa plus grande honte et la violence dans ses yeux quand ce mot te fait sourire. Penser à l’avenir. Voilà encore une nébuleuse abstraite dans laquelle tu te projetais bien mal. Un engagement précoce contraignait tout ton champ des possibles. Non pas que tu aies encore à te soucier d’avenir, n’est-ce pas ? Avec quel genre de projets pouvait-on remplir une éternité de rien, tu te le demandes à chaque silence. Comme celui-là, assourdissant, qui pèse sur tout l’appartement quand tu entres. Tu l’avais cru vide d’abord, déserté comme l’une de tes représentations mentales. On y trouvait peu de choses pour l’espace disponible, quelques vieilleries poussiéreuses, quelques meubles érodés. Loin de quoi que ce soit auquel tu pouvais prétendre, ce qui t’étonnait beaucoup. Ta mère ne te respectait pas mais elle se respectait beaucoup, et tu ne la voyais pas se mêler à une pareille misère à moins de n’avoir pas d’autre choix. Mais là encore, les Egerton avaient perdu de leur superbe en quelques décennies et presque chacune de tes sœurs et toi étiez un clou de plus sur le cercueil. Pourtant, si tu ne jugeais pas une tête sur l’envergure de son compte en banque pour avoir passé d’excellents moments dans les bas-fonds de Dragon Alley, tu devais bien reconnaître que tu t’attendais à mieux. Mais ça te rend curieux, et tu t’éparpilles à ouvrir les placards et regarder ce qui traîne comme autant de fausses promesses et de tentatives d’extorquer ta mère, un projet qui justifierait presque le mariage pour le chaos pur que cela déchainerait.
La vieillerie la plus encombrante, le bibelot le plus poussiéreux, comme le meuble le plus érodé – étaient, à n’en pas douter, la silhouette flasque que l’on avait abandonnée dans un fauteuil. Son visage eut du mal à te revenir, après tout tu ne l’avais vu que très peu et dans un état sensiblement meilleur, mais là encore tu étais assez mal placé pour la juger. Elle aussi semblait de l’ordre des parasites refusant de lâcher prise, elle aussi était responsable de façon équivalente à cette pression que l’on avait pu te faire peser. Une femme qui ne s’était pas gênée pour exhiber son enfant comme un cadeau de mariage à un adulte dont elle ne savait rien était indéniablement une femme répugnante. Tu as, dans le cœur, une pulsion de violence qui te prend tout entier de l’envie de la défenestrer tout de suite. Tu la regardes, et tu rêves que ses joues molles soient tailladées d’éclats de verre et qu’on n’y reconnaisse rien. C’est tout ce que cela t’inspire de la voir, et tu restes un temps à la toiser depuis les ombres, torturé de savoir que tu n’en seras malheureusement jamais capable.

Tu retrouves ton calme en quelques respirations mauvaises, décidant de quitter ton refuge pour la laisser te voir, mais la démente ne daigne même pas te trouver suffisamment intéressant pour t’accorder un seul regard. « Madame Ó Banríon. Mes hommages. » tu lui dégueules, d’une voix doucereuse qui ne lui souhaite rien de mieux qu’un égorgement. Tu as compris qu’elle ne te donnera pas de réponse, alors tu n’as pas de scrupule à la traiter comme bon te semble. « Basil, vous me remettez ? Probablement pas, à en juger l’inintelligence qui suinte de vos yeux. Je n’aurais pas cru le dire mais de nous deux, je crois que je suis encore celui qui s’en sort le mieux. Vous ressemblez à un déchet dans une déchetterie. Au moins, vous êtes à votre place. » Elle semble vaguement saisir quelques bribes mais pour être tout à fait franc, tu ne t’en préoccupes pas assez pour le savoir. Tu te fiches qu’elle t’entende ou ne t’entende pas, tu veux juste lui dire les choses au visage pour le soulagement de ta propre frustration. Promenant tes yeux sur ses photographies, tu cherches un autre visage qui ne te sera sans doute pas plus familier. Son mari ou Charlie, peut-être. Allez savoir qui méritait d’être exposé sur son autel de mémoire. Tu n’étais même pas sûr que ta mère possède la moindre photographie de toi au-delà de tes quinze ans, ce qui devait correspondre à l’âge auquel elle avait renoncé à ce que tu la respectes un jour.
Il n’y avait personne d’autre dans l’appartement, mais tu avais la certitude que Charlie rentrerait tôt ou tard. Tu avais l’éternité devant toi, tu n’étais pas pressé – tout au contraire, tu mis ce temps à profit en t’élançant dans une fouille minutieuse de tout ce qui te passait sous la main. Ouvrant les placards, lisant la cote de ses ouvrages, explorant une garde-robe inspirant la pitié. Prenant le temps, à mi-parcours, de préparer rageusement le thé à ta compagne de patience, parfumé à quelques produits ménagers – mais qu’elle ne boirait pas sans doute, considérant la malédiction qui te rendait incapable de tuer personne. De ta fouille, tu ne pouvais vraiment déduire qu’une chose : c’est qu’il n’y avait d’argent nulle part et qu’il tendait même à manquer. Quant au reste, scrupuleusement rien d’autre n’avait stimulé ton intérêt, mais rien d’étonnant à ce que tes loisirs divergent beaucoup d’une jeune femme dans sa vingtaine – depuis ton statut de mort à n'être ni femme ni dans ta vingtaine.

Et puis, la porte avait claqué. L’ouïe tendue, retrouvant le couvert des ombres, tu avais rejoint le seuil et suivi l’échange à sens unique entre mère et fille. La mention de ton nom, après t’être convaincu qu’elle était sûrement sourde comme un pot, te provoqua un frisson d’adrénaline et d’appréhension, mais tu restas silencieux, profitant de ce laps de temps pour étancher en partie la curiosité qui t’avait fait venir. Charlie était… Eh bien, à vrai dire tu n’en pensais pas grand-chose. Elle était toujours infiniment plus jeune que toi, malgré les six ans que tu avais perdus dans la mort, mais ce n’était pas ton souci – après tout ce qui t’importait vraiment, c’était de voir autre chose qu’une morveuse en cours de développement posant des questions irritantes et stupides sur ta couleur de cheveux, et plutôt un humain adulte, globalement achevé et capable d'intelligence. Ceci étant dit, il y avait une part de déception. Tu aurais aimé qu’on te prouve que tu avais tort et être accueilli par de l’inattendu, pour le seul plaisir d’être déstabilisé et ravaler ta langue. N’importe quoi vraiment, une Charlie édentée, une jambe de moins, des cicatrices sur la figure. Un tatouage de Ted Bundy sur la nuque et un arsenal aux balles d’argent autour du bassin. En fait, elle te semblait si terriblement normale, et d’imaginer que tu aurais pu t’encombrer le reste de ta vie d’une compagnie si fade te ravissait d’être décédé si tôt. C’était pourtant attendu, ça aurait même dû être rassurant – mais toi, tu étais venu en quête d’intrigue et de stimulation, préférant les images rugueuses aux images lisses. Hélas trop souvent la vie n’avait rien à t’offrir, il n’y avait pas de raison que mort, elle te traite autrement.
Pour autant, tu le reconnais, Charlie n’est pas désagréable à l’œil. Elle était même franchement jolie, et elle aurait eu de quoi te plaire mais plutôt pour l’hôtel que l’autel, pour la nuit sans conséquence plutôt que l’échange des alliances, c’était bien là le problème. Un problème qui n’en était plus un, puisque fort heureusement ou malheureusement, tu n’étais plus capable ni de l’un ni de l’autre. Et de toute façon, elle pouvait s’armer du visage le plus innocent, elle n’en était pas moins la cause d’une vaste quantité de problèmes dont tu te serais bien passé, et qu’elle incarnait de sorte à ce que tu n’aies d’autre choix que de trouver son existence désagréable. Tu l’accompagnes à la salle de bain, muet comme une tombe, constituant ton jugement de sa personne sur ce que tu voyais, entendais, et sur tes propres réflexions qui effondraient son score sans aucune impartialité. D’un coup d’œil tu t’étais invité dans les échanges de ses SMS, t’emparant même sans vergogne de l’appareil lorsqu’elle était trop occupée par sa toilette, admirant avec un certain cynisme le genre de mariage qui aurait pu être le vôtre. C’est dire, des infidélités sans vergogne que vous ne prendriez pas la peine de vous cacher, et peu de manières de vous mettre d’accord, si ce n’était pour cracher sur l’idée infâme de vos parents respectifs. Une situation de compromis qui en réalité aurait eu peu de chances de se produire, puisque tu l’aurais assassinée avant d’y être, probablement.
Tu navigues encore dans quelques applications, relevant seulement un sourcil lorsqu’elle murmure ton prénom sans crier gare. Pendant un quart de seconde tu te crois démasqué, mais non - tu étais seulement le nœud de ses contrariétés comme elle était le nœud des tiennes. Probablement l’expérience la plus intime dont vous ferez jamais l’expérience, soit dit en passant. Ce n’est que lorsque lassé tu relâches son téléphone où tu l’avais trouvé qu’elle ne semble s’alerter de ta présence. Y’a quelqu’un ? appelle-t-elle, tu soupires, hésites et décides de la taquiner un peu, pour ton seul amusement. « Tu as appelé mon nom trois fois et tu m’as invoqué des enfers. Je suis là pour sceller le pacte et te débarrasser du légume qui moisit dans ton salon. » Tu lui apparais, un sourire aux lèvres que tu perds aussitôt, appuyant nonchalamment ton coude contre son lavabo, reprenant d’une voix beaucoup plus terne. « Plus ou moins. Bonjour Charlie. » Elle était une fée certes, mais tu n’avais pas la moindre idée de sa susceptibilité à faire une crise cardiaque avec ce genre d’intervention surnaturelle intempestive. Tu croyais maigrement en cette chance, même si cela reviendrait à t’ôter toute autre source de distraction et toute opportunité à ce que vous discutiez "calmement". Tu ne semblais pas faire cas le moins du monde de sa nudité, étant extrêmement insensible à l'effet de contagion de la honte ou du malaise. Pour être franc, tu avais vu circuler assez de viandes sur tes cadavres et tes partenaires sexuels - et la maigre intersection entre ces deux groupes - pour te passer l'envie de prétendre de la gêne. Surtout quand sa poitrine t'évoquait en premier lieu deux ravissants poumons et un cœur coincé dans leur étreinte, et ensuite seulement deux sacs de graisse capables de lactation. On ne se refait pas.
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Charlie ó Banríon
Charlie ó Banríon
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BASIL & CHARLIE

UN JOUR MON PRINCE (PAS CHARMANT) VIENDRAAA



Les pensées de Charlie étaient constamment en effervescence. Même rentrée et posée chez elle, ça ne cessait jamais de fuser dans sa tête. Lorsque ce n'était pas son inquiétude concernant sa mère, c'était le soucis des factures qui s'accumulaient. Lorsque ce n'était pas les factures, c'était Wyatt et ce qu'il devenait, ce qu'il lui avait fait... Et si ce n'était pas Wyatt, c'était sa mère... Un cercle sans fin dont elle ne sortait jamais. La fée ne respirait plus vraiment, constamment soucieuse, constamment incertaine. Elle se démenait et faisait de son mieux pour tout mener de front mais elle vivait en apnée et l'oxygène que lui était son sorcier depuis qu'elle l'avait surpris au cinéma avec un autre... ne lui suffisait plus. Le répit, l'air qu'il lui donnait d'habitude et duquel elle vivait était devenu plus épais. Plus brûlant pour ses poumons. Elle avait besoin de le respirer pour exister alors elle ne s'en détournait pas, mais il lui faisait mal désormais... Wyatt lui avait brisé le cœur en étant dans l'ignorance de l'avoir fait mais le résultat était le même ; Charlie vivait en apnée quasi constante à présent tant son palpitant peinait à battre sans douleur et à l'abris de tous les regards, elle s'en laissait accabler.
L'intimité de son appartement était le seul lieu où la fée pouvait souffler et cesser de faire semblant que rien ne pouvait jamais la blesser. Cette apparente confiance, cette prétendue insolence qui lui servaient de refuge et de défense contre le monde ne valaient plus rien lorsqu'elle était chez elle. Elle retirait son maquillage comme elle retirait un masque, ses vêtements toujours à la pointe de la mode malgré ses faibles moyens tel un costume de scène et laissait la douche la purifier de ses fabulations de la journée.
La beauté rassurait. Elle ouvrait des portes. Les gens étaient plus ouverts et à l'aise face à elle et la jeune fille l'avait vite compris et donc appris à user de la sienne comme d'une parfaite armure en plus de ses dons féeriques afin d'obtenir ce qu'elle voulait et ce dont elle avait besoin. Charlie était un joli mensonge. Une douce illusion sachant à la perfection manipuler son monde afin de se hisser à travers la vie qui cherchait constamment à la renverser de ses vagues trop violentes. Elle envoyait son charisme autant que ses minauderies faussement innocentes à la tête des gens pour les envouter et tirer profit de tout ce qu'elle pouvait d'eux. C'était son droit après tout non ? Elle le pouvait alors pourquoi s'en priver quand c'était son seul avantage à exploiter ?! Elle s'en sortait comme elle le pouvait depuis ses 14 ans où elle s'était retrouvée seule avec sa mère à nouveau et jusqu'à présent ça ne lui avait pas trop mal réussi.

En sortant de la douche, il n'y a plus de fadaise. Plus de faux semblant. Il n'y avait plus qu'elle. Elle dans toute la plus pure vérité. Son corps luisait encore de l'eau ayant lavé son derme de ce qu'il avait du porter toute cette fichue journée. La jeune femme secoua ses cheveux de ses doigts fins afin de les décoller les uns des autres et qu'il sèchent mieux à l'air libre, puis sortit de la cabine en tendant sa main vers la porte au dos de laquelle sa serviette était suspendue.

- Tu as appelé mon nom trois fois et tu m'as invoqué des enfers.
- AAAAH !


Putain c'était quoi ça ? Secouée d'un violent sursaut, Charlie se tétanisa sur place et regarda partout autour d'elle de ses grands yeux hagards à la recherche de la provenance de la voix. Parce qu'elle ne l'avait clairement pas rêvé là cette sensation de présence ! C'était quoi ce bordel ?!
Son palpitant affolé dans sa poitrine, elle déglutit avant de se rendre compte que son portable avait été bougé de place. Bordel il se passait quoi ?! Elle chercha encore mais à l'évidence il n'y avait personne avec elle et tout était silencieux dans le foyer !

- Je suis là pour sceller le pacte et te débarrasser du légume qui moisit dans ton salon.
- Maman...!


Charlie ne chercha pas à analyser d'avantage ce qui se passait. Le frisson qui la saisit de la racine de ses cheveux à la pointe de ses oreilles la fit blêmir instantanément et soudain la voix n'eut plus aucune importance.
Sa mère avait beau ne presque plus être véritablement "là", la petite fille enfouie en elle ne pouvait pas faire autrement que de l'aimer désespérément... Elle gardait dans sa mémoire tous les souvenirs de cette femme, de ce qu'elle avait été et elle s'y raccrochait parce que sans cela, sans elle, elle n'avait plus rien. Elle serait définitivement toute seule et ce n'était pas une réalité que Charlie était encore prête à accepter... Elle était si effrayée à l'idée d'être seule ! D'être abandonnée ! Elle ne pouvait pas perdre sa mère ! Même si elle l'avait oublié suite au décès de son père. Même si la fée n'avait pas été suffisante pour garder sa maman consciemment près d'elle... Elle en souffrait et se blâmait, de se dire qu'elle n'était pas assez, qu'elle était trop insignifiante ou peut-être pas digne d'être aimée suffisamment pour avoir évité que sa mère ne se perde 20 ans plus tôt, mais elle passait chaque jour à essayer de se rattraper pour ça...
La peur au ventre la précipita vers le salon bien qu'avant d'atteindre la porte l'en séparant, elle se retrouva nez à nez avec un type littéralement sortit de nulle part qui lui arracha un cri. Ses yeux écarquillés, la fée cligna des paupières en reculant tout en le dévisageant, ne s'arrêtant que lorsque son dos rencontra sèchement la douche. Il sortait d'où lui ? C'était qui ?!

- Plus ou moins. Bonjour Charlie.

Acculée et le souffle court elle resta là quelques secondes à le regarder sans comprendre. L'appel de son nom lui fit froncer ses sourcils fins à l'arc parfait. Elle avait prononcé son nom trois fois ? A quel moment ?! Et lui d'où il connaissait le sien ? Puis comment il avait fait pour rentrer ? Elle avait fermé à clé elle était formelle ! IL SE PASSAIT QUOI PUTAIN !?

- Vous... Qui vous...?  

Les mots restaient en otage  de ses cordes vocales atrophiées par la peur. Charlie avait beau faire partie du monde surnaturel, elle n'y avait jamais été véritablement confrontée et le découvrait au même titre que quiconque en aurait ignoré l'existence. Savoir que c'était réel était une chose. Y être mise face à face en était une autre... La jeune femme passa en revue aussi vite que possible les euh... races...? Espèces...? que Wyatt lui avait énumérées mais elle était dans un tel tourbillon d'incompréhension et de surprise qu'elle n'arrivait pas à réfléchir correctement. Qui avait le pouvoir de quoi déjà ?!
Ou alors est-ce que c'était un chasseur ?! Le souvenir encore trop affuté de cette nuit où l'un d'eux avait croisé sa route se raviva et acheva de la clouer sur place. Ses mains sur elle, le poids de son corps qui l'entravait, sa lame sur sa peau, les cris effrayés qu'elle avait poussé...  
Comme muée par son songe, Charlie effleura de ses doigts la cicatrice juste sous son sein qu'elle gardait de ce cauchemar et réalisa soudain qu'elle touchait sa peau et non le contact rugueux d'une serviette trop souvent lavée ! Putain ! Vivement son visage se baissa pour se retrouver face à sa nudité qu'elle enveloppa par reflex de ses bras. Le rouge lui monta aux joues alors qu'elle regardait presque avec détresse le peignoir suspendu derrière l'inconnu qui lui rendait son regard sans la moindre formalité ou gêne apparente sur ses traits. Il n'allait pas se pousser non ?!
Bon sang elle avait envie de disparaître ! Charlie n'était pas habituée à se montrer si décontenancée face à autrui mais elle était prise de court et littéralement totalement à nue face à cet homme qui la voyait comme elle ne s'était encore jamais montrée face à personne. Pas même à Wyatt...  

Sa pudeur mise à mal, Charlie pinça ses lèvres alors que malgré ses craintes habituelles à montrer ses ailes, elle s'en enveloppa, se réfugiant derrière leur beauté luminescente. Dans son émoi elle ne remarqua même pas que le miroir suspendu au dessus de l'évier qui accueillait l'intrus reflétait néanmoins les plaies marquant son dos à présent exposé. Des stries faites par autrui, par la vie, mais également et surtout par elle-même en des moments où elle s'était sentie si seule et si mal dans sa peau d'être tellement à part, qu'elle avait cherché par tous les moyens à en sortir...
Charlie s'était lacérée plusieurs fois... Elle s'était fait du mal pour étouffer celui qui le rongeait sans cesse de se sentir telle une anomalie parmi les humains... Elle avait mutilé ses ailes tant elle les détestait pour ce qu'elles faisaient d'elle et qu'elle ne comprenait pas en ce temps... Assise seule sur ce même carrelage, au désespoir et en proie à ses sanglots après le décès de Ella, elle avait essayé de se les arracher juste pour pouvoir être normale... Pour qu'elles ne lui prennent plus jamais rien... Mais elle avait manqué de courage pour aller au bout. Elle avait eu trop mal et s'était finalement endormie au milieu de son propre sang pailleté de sa poussière échappée...
Elle en gardait le vestige à la base de son aile droite en une profonde entaille grossièrement cicatrisée, que même sa magie n'avait jamais réussi à proprement refermer.
 
La jeune fille à présent plus ou moins couverte, sentit enfin sa nature revenir au galop et se recomposa une contenance. Son regard retrouva son mordant et sa lueur défiante presque insolente qui la caractérisait. Elle redressa son menton bravache, s'interdisant comme toujours de baisser son regard qu'elle riva à l'inconnu.
Elle le détailla sans dire un mot, bien que dans sa poitrine son cœur était prêt à exploser. Il connaissait son prénom... Il lui avait dit qu'elle avait prononcé son prénom trois fois... Quel prénom...? Charlie réfléchit. Elle n'avait absolument rien dit ! Elle avait juste... "Basil" fusa dans sa mémoire. Les pièces du puzzle commencèrent à s'assembler.
Basil ? Le Basil ? Ce Basil ? La fée releva ses yeux vers sa chevelure qui l'avait marqué enfant. Son visage avait beau être devenu flou avec les années depuis que sa mère l'avait emmené chez ces gens, la couleur de la chevelure de ce garçon bien plus grand qu'elle l'avait marqué.

- Les cheveux oranges !

Mais euh... Les fées avaient le pouvoir d’apparaître et disparaître comme il venait de le faire ? Parce qu'elle n'avait jamais réussi à faire ça elle ! Wyatt ne lui avait rien dit sur le sujet non plus !

- Basil...? Ça va t'as vu tout ce que tu voulais ?!

La meilleure défense était l'attaque ! Et Charlie retrouvait sa verve.

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Basil Egerton
Basil Egerton
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RACE : Fantôme (ex-fée)
MÉTIER/ÉTUDE : Gardien du cimetière

Un instant, à peine – il ne t’avait pas fallu davantage pour démontrer la superficialité de toutes ces politesses qui servent de couvert à tes discutables habitudes. A dix lieues de tout bon sens, sans la moindre compassion pour cette représentante de la gent féminine que tu venais secouer sans vergogne dans son intimité. Tes quelques mots lâchés en l’air lui valent un hurlement que tu as l’audace de ne pas comprendre. Tu l’avais anticipé pourtant, caressant le maigre espoir d’un arrêt cardiaque venant interrompre précocement l’échange ; depuis le temps que tu étais mort, tu avais eu bien assez d’occasions de jouer au poltergeist. Tu t’étais même découvert une passion pour tyranniser les agents immobiliers et potentiels acheteurs venus lorgner ta propriété à grand recours de portes claquées, de raclement d’ongles et de souffle suaves, et, parallèlement, pour envoyer valser les bibelots les plus laids que Castiel s’obstinait à garder dans son salon et les casser pour te passer les nerfs. Tu avais donc raisonnablement eu droit à ton lot d’effroi, mais la solitude rendait les gamineries fades – ta présence éthérée, devenue une réalité systématique et quotidienne, s’était accompagnée de résignation. Plus souvent cordial, tu aimais à retrouver les affres de la vie sociale, quoique envenimée par le recensement de ton portrait dans la base de données de tous les commissariats d’Irlande. En t’appliquant à oublier le caractère anormal de ton existence quand cette dernière se démenait à te le rappeler, tu en perdais toute notion de ce que tu pouvais provoquer chez les autres, surtout quand tu étais dans une optique de plaisanterie. Pourtant de ton vivant, tu en aurais été le premier inconfortable si, en t’adressant à un mort, l’un d’eux avait spontanément décidé de te répondre.
Bien sûr, révéler ta nature continuait de mettre mal à l’aise, et tu concevais très bien que ta plaisanterie la plaçait dans la même situation – c’était même tout l’intérêt mais voilà : ce n’était qu’une plaisanterie. Tu ne t’attendais pas à ce que tes mots soient pris pour argent comptant. Le hurlement, pourtant, fut si spontané qu’il t’arracha un curieux frisson ; et de la voir ainsi horrifiée et sans repères, l’air hagard, les orbites larges et les pupilles noircies d’angoisse, faire tout naturellement le lien entre sa mère et le mot légume soufflé avec force de dérision entre tes dents, te rendait presque hilare. Cela n’avait rien de sadique, d’ailleurs en renseignement anecdotique, tu n’avais jamais pris le moindre plaisir à entendre aucune de tes victimes appeler maman et ça t’incitait même plutôt à les finir plus vite. Non, c’était purement moqueur. Tu t’amusais surtout du décalage qui s’opérait entre sa panique et la réalité de sa situation, comme tu étais très conscient qu’elle n’avait rien à craindre de toi dans ton état actuel. Même s’il ne s’agissait que d’une tromperie, la perspective d’en tirer ce que bon te semblait sur des menaces vides te rendait une impression de pouvoir qui n’était pas déplaisante, et tu ne pouvais que te demander, devant sa face blême, jusqu’où tu pourrais pousser la bêtise avant qu’inévitablement ton impuissance ne soit découverte quand il te faudrait passer à l’acte.

Ce n’est que lorsqu’elle s’élance pour quitter la pièce que tu surgis des ombres. Bonjour Charlie. L’amusement avait fondu aussi vite qu’il était venu mais tu n’avais pas fini de jouer. En tout cas, il n’était pas question de la laisser sortir – tu n’avais pas l’intention de la pourchasser jusqu’au salon, ou jusqu’au bout du monde, quand s’inviter dans sa salle de bain s’était déjà avéré une corvée suffisante. Tu ne savais pas encore combien de temps il faudrait pour que tu te lasses ; si dans cinq minutes tu serais dehors, si le désintérêt serait tel que tu renoncerais à l’envie de la faire crever, si au contraire elle allait t’enrager davantage, ou piquer suffisamment ton intérêt pour que tu la harcèles ; si tu allais décider de la tourmenter quelques heures ou jusqu’à sa mort, lente ou brève. Quoi que tu décides cependant, tu comptais bien te fixer maintenant, dans l’espace restreint et sans gloire situé entre sa douche et la serviette rêche pendue à la porte de sa salle de bain.
Vous… Qui vous… ? Elle ne te reconnait pas, le contraire aurait été étonnant – quoi que tu lui aies déjà livré un indice assez conséquent et que tu savais de ses précédents murmures que ton nom circulait dans sa mémoire très proche de la réminiscence. Tu te redresses et l’observes dans son cheminement de réflexion sans te soucier de lui donner davantage d’informations, admirant les crevasses de la peur et de la confusion dans ses expressions faciales, et la ligne artiste de ses doigts venue souligner la courbe d’une cicatrice sous son sein. A celle-là tu ne t’intéresses que peu, comme tu ne peux pas concevoir que Charlie puisse mener un quotidien moins barbant que ne pouvait l’être son appartement – tu te l’imaginais davantage avoir dérapé avec un épluche-légumes que d’avoir essuyé une tentative d’assassinat. « Allez, tu n’en étais pas loin. » La remarque désobligeante surgit d’elle-même dans son panache de condescendance, alors que tu dénigres dans tes propres pensées le foutoir qu’il devait y avoir dans les siennes. C’est plus fort que toi, l’air ambiant te donne de l’urticaire. Elle semble en démêler quelques fils et réaliser sa nudité à rebours, s’empressant de protéger sa pudeur, une pourtant maigre priorité considérant que sa vie était potentiellement menacée – mais tu ne pouvais pas la blâmer de se sentir ainsi moins vulnérable. Après tout tu avais grandi entouré de femmes, tu avais suffisamment entendu ton aînée vomir les hommes pour savoir à quel genre de comportement ton intrusion pouvait être associée. Ce qui t’intéresse davantage en revanche, c’est le regard qu’elle te permet d’avoir sur ses ailes. Tu as l’impression de n’en avoir pas vu depuis une éternité, depuis ta mort en réalité, et les tiennes te manquent profondément – ça te donne un sérieux pincement au cœur, bien plus que tu ne saurais l’expliquer. Pourquoi la mort t’avait-elle privé de tes ailes ? Tu te sentais étrangement incomplet, et tu ne faisais pourtant pas partie de ceux à les sortir très souvent. La poudre, en revanche, avait toujours été chez toi une habitude, et de ne plus pouvoir t’en servir ajoutait lourdement à ton sentiment d’impuissance.

Balloté par la mélancolie, tu interromps ton deuil en cours lorsque ton regard s’arrête sur le reflet du miroir te révélant son dos. Immédiatement, tu devines la profonde cicatrice à la base de son aile – et tu sais la souffrance qui lui est associée. Tu le sais parce que tu as rencontré une fée, autrefois, qui t’avait supplié de l'en débarrasser. Tu le sais parce que tu étais le premier, au Dux Tenebris, à expérimenter sur les créatures que les chasseurs lâchaient dans ton laboratoire. Tu le sais parce que tu as fantasmé toute ta vie sur ta mort et que de tous les scénarios plausibles, la perte de tes ailes était la seule qui te provoquait de la sueur froide et des nausées. Tu ignorais si elle devait cette cicatrice à elle-même ou à la cruauté d’un chasseur, mais tu en avais la curiosité suffisamment piquée pour vouloir entendre l’histoire qui lui était associée. Tout du moins, tu le voulais jusqu’à ce qu’un commentaire désobligeant de sa part ne diffuse ton trouble et te ramène à la lassitude dans un roulement d’yeux théâtral. Les cheveux orange, sérieusement ? Juste pour ça, elle aurait mérité d’y passer tout de suite. Basil… ? Ça va t’as vu tout ce que tu voulais ?! Au moins, elle avait su faire tourner sa matière grise pour trouver sans que tu aies à le lui faire deviner en charade. Avec un soupir irrité, tu saisis la serviette dans ton dos et la lui jette sans considération. « Tu m’excuseras, mais je préfère les femmes mures. » Une douce allusion, bien sûr, au fait qu’elle se bavait encore dessus à l’époque où tu l’avais rencontrée – elle était définitivement trop jeune pour te plaire, surtout quand tu n’avais d’elle que des souvenirs d’enfant. Mais c’était aussi vrai que tu tenais dans ton palmarès quelques grands-parents échangistes peu farouche, considérant que tu n’étais pas très regardant de tes conquêtes ; tout un panel d’anecdotes juteuses pour qui voudrait les entendre, c’est-à-dire très peu de monde. Le mari rêvé, décidément. « Je constate que ton intelligence en est restée à considérer les mots roux et orange comme interchangeables, je vais donc essayer d’utiliser un vocabulaire simple pour que tu ne sois pas perdue. » Puisqu’elle avait décidé d’être désagréable, tu n’allais certainement pas t’en priver non plus – de toute façon, tu n’avais pas vraiment besoin d’excuse, tu étais venu exprès pour ça. Quelque part ça te faisait plaisir qu'elle t'invite à la dispute, tu préférais de loin qu'elle soit farouche plutôt qu'elle pleurniche. « Si, comme moi, tu étais tentée de classer cette histoire d’engagement dans la catégorie des rêves fiévreux dont tu espérais surtout ne plus jamais entendre parler, je suis venu t’annoncer une excellente nouvelle. Tu vas pouvoir rester pauvre et célibataire, j’ai tué cette option définitivement. » Définitivement et très littéralement d’ailleurs. Est-ce qu’elle s’en souvenait au moins ? Rien n’est moins sûr. Après tout, tu avais fait de ton mieux pour l’oublier chaque jour de ton existence, tu ne pouvais que supposer qu’elle avait fait de même. En soit témoin ton incapacité naturelle à te mettre à la place des autres – tu partais du principe que si tu en avais fait ta priorité du jour, elle devait en être au même niveau que toi. « Mais pour te débarrasser du légume, je suis très sérieux. Qu’est-ce que tu fabriques encore avec ? Penses-y, tu dois avoir l’âge que j’avais quand ils m’ont mis ta photo sous les yeux. A tous les niveaux, ça mérite une mise à mort – bon sang, que j’ai de la haine chaque fois que j’y pense. » Tu rêvais encore de dégager madame de son canapé et de la traîner par les pieds dans les escaliers sur quatre étages, tu en rêvais les yeux noirs de la saigner dans une baignoire, et peut-être qu'alors, Charlie vivrait d’autre chose que d’être la fille de sa mère. Toi, tu n’avais pas su vivre avant de cracher tes glaires au visage de la tienne, et tu ne pouvais imaginer qu’elle mène une vie normale avec une telle ordure dans son salon.
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Un jour mon prince (pas charmant) viendraaa (Basil]
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