Aidan G. River
Calme + Patient + Froid + Distant + Sarcastique + Curieux + Joueur + Provocateur + Franc + Méfiant + Rancunier.
Aidan c’était le gars qui ne perdait jamais son sang froid. Pour qui la vie n’est qu’une vaste blague, un terrain de jeu. Le genre de type qui se fout de la gueule de tout le monde, qui n’hésite pas à défier le monde. Celui pour qui les seules règles qu’il respecte, ce sont les siennes. Et les autres peuvent bien aller se faire voir. Leur avis lui passe bien au dessus de la tête.
Aidan c’était un gars solitaire de nature, mais qui aime la présence des autres, qui n’a aucun mal à aller leur parler, à déconner avec eux, à trouver des compromis s’il le faut, tout en ayant besoin d’aller tous les envoyer chier de temps à autre pour se retrouver seul. Ne faisant confiance à personne au fond, à part son propre jugement et son celui de son frère.
Aidan c’était le gars qui, malgré tout ça, ne pouvait pas s’empêcher de voir ce qu’il se passait ailleurs, d’aller fouiner dans les affaires qui ne sont pas les siennes, de poser des questions déplacées. Un sans-gène au franc-parler qui en faisait pâlir plus d’un.
Aujourd’hui, ce Aidan est toujours là, c’est toujours le même. Il est juste plus usé. Il s’est entouré d’une couche de cynisme. Le monde qui tourne autour de lui ne l’amuse plus. Il le désespère. Il n’a plus aucun espoir en l’humanité. Il s’est renfermé. Cela ne l’empêche pas de se moquer des autres, de leur avis. Mais à présent, il doute même de son propre jugement, surtout depuis qu’il s’est éloigné de son frère.
Puis il a cette folie latente qui a fait son nid dans un coin de son esprit. Ce besoin de péter les plombs de temps à autre, de tout envoyer en l’air, de retourner son bureau et de lancer tout les objets qui lui passe sous la main à la gueule du premier passant. Ou de tout réduire en cendre. Ce genre d’excès ne lui est pas arrivé souvent. Mais Aidan sait que c’est là. Il sait que ça finira par ressortir et ça le terrifie.
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;
« Salut Zecke,
Le temps à beau passer, ce monde reste toujours une belle merde hein ? Il ne nous a pas épargner, même nous qui pensions que rien ne pouvait nous atteindre, qu'on ne laisserai jamais personne nous faire chier ni nous séparer. Bordel, comment on en est arrivé là frérot ?
Je me pose souvent cette question en ce moment. Je suis revenu tout au début. Tu sais, l'orphelinat, sans doute le seul endroit qui ait réussi à nous garder prisonnier aussi longtemps. On formait un sacré trio avec Violet, déjà à cette époque on ne laissait personne nous marcher sur les pieds. Et on s'est fait cette promesse, tu te rappelle ? Celle de ne jamais se quitter. On était prêt à tout foutre en l'air l'un pour l'autre. C'est ce qui est arrivé d'ailleurs. Ils voulaient nous séparer, alors on s'est barré.
Des fois j'essaye de m'imaginer ce qu'aurait été une vie si nous avions été adopté par une famille. Ouais… nous… Je n'arrive pas à concevoir qu'on se retrouve séparer. Parce qu'il n'y aurait pas de famille si tu n'étais pas avec moi Zecke. Mais tout ça n'est qu'une belle fantaisie. Ce n'est pas arrivée, il vaut sans doute mieux que j'évite d'y penser.
On peut dire que c'est à partir de là que tout à commencé pour nous. Les squats, les conneries, les vols, et tout ça n'a fait que prendre de l'ampleur. On est devenu de sacrés pointures dans le genre. Maintenant que j'y repense, notre premier braquage faisait vraiment merdier. Rien à voir avec nos derniers coup. Il faut dire que j'étais loin de maîtriser le hacking qu'à présent. Putain, je me souviendrais toujours du premier PC que tu m'as offert pour mes quinze ans. Mec, tu t'es tellement défoncé pour moi. J'ai toujours eu l'impression de ne pas être capable de te rendre la pareille.
J'ai presque envie de décrire cette période comme nos Golden years. Avec Orphée qui s'est greffé à notre groupe. J'aurais peut-être du sentir le coup venir cette fois là. J'aurais du me douter que trois, ce n'était jamais un bon chiffre pour nous. Après tout, on avait déjà perdu Violet, et maintenant ça ? Mais jamais je ne t'avais vu comme ça gars. Cette fille, elle t'as totalement hypnotisé. Je ne comprenais pas comment un tel truc était possible à l'époque. Je trouvais même ça assez débile. Mais t'avais l'air tellement heureux Zecke, je n'avais pas le droit de m'opposer à ça. »
Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;
« Je dois vraiment revenir sur Nantes ? Notre déclin, la chute. Tout ça pour arriver à Bray, comme deux imbécile, totalement perdu, avec l'idée de se faire oublié. Mais il n'y avait pas que ça hein ? Pour toi, c'était une toute autre affaire hein ? J'ai vraiment cru que j'allais te perdre à cette période Zecke. J'ai eu peur que tu fasse une connerie et que tu m'abandonnes comme un con. Alors c'est sûrement égoïste, mais j'ai tout fait pour que tu reste avec moi. Ouais, j'avais peur d'être seul. Et peut-être que cette idée m'effraie encore un peu aujourd'hui et que c'est pour ça que j'écris cette putain de lettre que je n'aurais sans doute jamais le cran de t'envoyer. »
Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D'une vaste prison imite les barreaux,
Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,
« Je n'ai pas honte de ce qu'on a vécu. Je ne regrette pas un seul instant notre fugue, ni aucune de nos braquages. A part Nantes, évidemment. C'est à cause de ça qu'on est arrivé en Irlande, c'est à cause de ça que j'ai rencontré Lana et… Et merde… Maintenant je sais ce que c'est que d'être fou de quelqu'un. C'est la meilleure de toute les drogues. Tu ne l'as sans doute jamais formulé ainsi, mais je sais que tu serais d'accord avec moi. Je n'ai jamais été autant accro à quelqu'un. Ca n'a toujours été que toi et moi puis il y a eu Lana et… Ce fut comme si tout le reste du monde n'avait plus d'importance. Je me suis laissé emporté par le tourbillon qu'elle était, par sa folie, sa joie de vivre, son monde haut en couleurs.
Crois-moi Zecke, j'aurais fait n'importe quoi pour cette fille. J'aurais abandonné l'idée d'un coup à Dublin, je serais devenu un type bien. Merde, mec, j'ai fait des rainbow cupcakes et je les ait vendu au profit d'une association caritative avec cette fille… Moi, le type qui n'en a jamais rien eu à battre du malheurs des autres. Je sais que c'est peut-être bête et que je m'emballe sans doute trop. Je ne suis pas resté bien longtemps avec cette fille avant qu'on ne me l'arrache. Mais ça a sincèrement été les plus belles semaines que j'ai jamais vécu, tellement intense, je me suis jamais sentis autant en vie.
Mais le karma est vraiment une bitch avec nous, hein Zecke ? Il faut croire qu'aucun de nous ne mérite un tel bonheur. On est des sales types qui n'avons le droit que de broyer du noir pour l'éternité. Et on ira brûler en enfer avec tous les autres, c'est ça ? Je me dit bien trop souvent que si je ne m'étais pas approché de Lana, elle serait peut-être encore en vie aujourd'hui. Tout du moins, c'est ce que je pensais avant d'apprendre que c'est cette putain de Kinkaid qui me l'a prise, et elle ne s'est pas contenté de mettre fin à ses jours…
Ce me coûte de revenir là dessus. Si tu savais à quel point j'ai envie de te haïr en pensant que tu as préféré prendre le partie de cette fille que le miens. Je sais que tu n'y peux rien, mais je n'arrive pas à ne pas te songer complice. Tu m'as déçu Zecke. Je pensais que tu tenais autant à mon bonheur que moi je tenais au tient. Bordel, je me demande qui est le plus égoïste d'entre nous. »
Des cloches tout à coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.
« Merci de m'avoir laisser partir. Je ne t'ai pas laissé le choix, c'est vrai. Il fallait que je parte. Je pense que tu le sais tout aussi bien que moi. Te voir avec elle, c'était plus que je ne pouvais en supporter. Et rester à Bray sans Lana, c'était comme vivre avec une main sur la gorge qui se resserre un peu plus tous les jours. Suffoquer jusqu'à ce que mort s'en suive. Je n'ai pas pu me résoudre à quitter l'Irlande dans un premier temps. Je voulais rester près de toi et aussi de Skye. « Sois proche de tes amis, et encore plus proche de tes ennemis. » Je passais mes journées à élaborer des plans pour venger Lana. Toutes ces histoires m'ont fait perdre la tête.
Tu as peut-être entendu parlé de ce qu'il c'était passé à Dublin. Ouais, on devait le faire ensemble, on a toujours fait nos coups ensemble. Mais j'étais bien trop énervé et aveuglé par la haine que je te portait, imbu de ma propre personne, je pensais pouvoir y arriver seul. Evidemment, j'ai échoué… Et j'ai littéralement craqué. J'ai mit le feu à la banque, sacré histoire. Et je me serais volontiers laisser dévorer par ces flammes si la police n'était pas intervenue. Apparemment, ils préfèrent encore me voir entre les mains de la justice que mort.
La suite n'est pas plus glorieuse que le reste de notre histoire. Je me suis retrouvé devant un tribunal, un avocat corrompu à mes côtés. J'ai volontiers avoué mes crimes sans jamais cité ton nom. Je leur ai rit au nez. Je leur ait raconté tellement d'histoire incroyable qu'ils ont fini par jugé que ce n'était même pas la peine de me mettre en prison. J'ai été renvoyé en France et c'est là-bas que j'ai fini interné.
Je préfère passer sur les années qui ont suivis. Désolé frérot, mais c'est encore au dessus de mes forces de parler de tout ça. J'ai honte de tout ça. Je n'ai jamais été aussi instable de ma vie. Et… j'avais besoin d'aide.
Mais tu sais ce que c'est, on dit que la vie n'est qu'une énorme boucle et que les événements se répètent sans cesse. Et t'es le mieux placé pour savoir qu'un River enfermé n'est que l'ombre de lui-même. J'ai fini par partir.
Et c'est de là que je t'écris Ezeckiel. Je n'ai nulle part où aller si ce n'est près de toi mon frère. Et cette maudite ville m'attire toujours à elle. Il faut croire que je n'arriverai jamais à me défaire du passé, alors autant y faire face. Je suis désolé Zecke. Je suis désolé pour tout ce qu'il s'est passé et tout ce qu'il va arriver. Mais tu sais que notre vie est lié et qu'il ne s'est jamais agi que d'une tragédie. Et elles se finissent toutes de la même manière.
Aidan. »
- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,
Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.