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 ••• Silence can't speak. | CLARA&GARETH

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Silence can't speak
•• En route vers Dublin
ft. Clara••
La voiture se gare en bas de l'immeuble que le conducteur observe quelques secondes à travers le pare brise de sa voiture, penché sur son volant. L'américain ne s'est toujours pas fait à cette fichue position de ce dernier à droite, pas plus qu'à la conduite à gauche en vigueur sur cette île et, à en juger par son regard déjà exaspéré, le trajet jusqu'ici n'a pas été sans quelques déboires routiers mêlés à la patience bien trop susceptible du texan dont la gestuelle brusque et énervée trahit son agacement. Le frein à main grince alors qu'il l'enclenche et la portière se referme aussi brusquement qu'elle s'est ouverte après qu'il soit sorti du véhicule.

C'est un véhicule d'occasion qu'il a pu trouver quelques jours après leur arrivée à Bray et, bien que la carrosserie en impose par ses lignes anguleuses et longilignes, elle contraste avec l'allure plus douce et rebondie de la plupart des voitures présentes dans ce pays aux routes étroites et bordées de murs en pierre. Mais que voulez-vous, quand on a passé toute sa vie à conduire des charrettes américaines, la transition n'est pas bien évidente.

L'ancien militaire s'appuie contre le capot de la voiture alors qu'il dégaine son téléphone portable sur lequel il pianote quelques mots à l'attention de celle qu'il est venu récupérer en cette fin d'après-midi. "Je suis en bas."
Le message est concis et va droit au but, tant à l'image de la franchise de son auteur que de la relation étrange qu'il a dernièrement avec sa destinataire.
Leur arrivée à Bray s'était soldée par une soirée qui aurait pu se contenter de se dérouler comme tant d'autres mais qui n'en avait rien fait. L'alcool aidant, tout comme certaines idées naissantes qu'avait pu avoir le texan à l'égard de sa cliente, ces deux derniers commirent ce qu'ils regrettèrent dès le lendemain. Sans jamais reparler de ce malencontreux dérapage, les deux fautifs ont depuis instauré une certaine distance l'un envers l'autre que Gareth n'ose plus franchir. Si la culpabilité et la honte le rongent déjà suffisamment, c'est surtout le regard que porte Clara sur lui qui l'inquiète le plus à présent. Pour qui doit-elle le prendre maintenant ? S'il sait que sa propre responsabilité dans ce déboire tient en partie du fait qu'elle lui avait déjà inspiré des pensées qu'il n'a cessé de réprimer, il craint qu'elle n'ait subi que les effets d'une soirée trop arrosée et qu'il ait profité de la situation. Comment peut-il en être autrement ? Quand bien même leur relation ait pu paraître familière avant ça, malgré ce gouffre qui les a toujours séparés, ce dernier est toujours bel et bien là et, force est de constater qu'ils n'appartiennent pas au même monde. Et cette ferveur avec laquelle Clara s'évertue à l'éviter ces derniers temps ne fait que le conforter dans cette idée.

Le bruit de la porte de l'immeuble tire le texan de ses pensées, lui faisant lever la tête vers celle qui se trouve contrainte de subir sa proximité alors qu'il s'apprête à  la conduire à un rendez-vous à Dublin. L'accueil du garde du corps est froid alors qu'il lui lance un simple "salut" en lui ouvrant la portière côté passager pour ensuite prendre place derrière le volant. Pour un homme dont la spécialité est de se foutre totalement des regards et des avis des autres, Gareth se trouve bien mal à l'aise dans cet habitacle étriqué qu'ils partageront pendant une heure, aller/retour.

La radio se lance quand la voiture démarre et Gareth évite consciencieusement le regard de la jeune femme, alors qu'il se retourne pour manœuvrer et prendre la route.

- T'as rien oublié ? Demande-t-il, comme pour briser ce silence pesant, bien conscient pourtant que sa question n'engendrera pas une conversation philosophique qui les tirera miraculeusement de cet exaspérant malaise qui leur plane dessus depuis des semaines.
☾ anesidora
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Sayanel Z. Pritchard
Sayanel Z. Pritchard
MESSAGES : 4496
RACE : Humain
MÉTIER/ÉTUDE : Mercenaire / Vigile au DH / Chasseur de Surnaturels




 


Silence can't speak

La main tâtonnant sur son réveil, Clara finit par ouvrir un œil, puis le deuxième, avant de se relever sur son lit d'un bond. Elle n'avait pas entendu les premiers appels de l'appareil, et était incroyablement en retard. S'il y avait bien quelque chose qu'elle détestait, c'était le manque de ponctualité, et elle ne pouvait pas se permettre d'arriver en retard lors de son premier tournage en terre irlandaise. Peut-être était-ce un acte inconscient, son esprit lui faisant savoir qu'elle n'avait aucune envie de devenir comme ces pauvres actrices reléguées au dernier rang parce qu'elles n'ont plus rien à offrir au monde. En toute bonne foi, la Singer était persuadée avoir encore beaucoup à donner, il lui fallait juste une occasion de le montrer. Ou bien elle n'avait tout simplement pas envie de se retrouver bloquée en voiture pendant une heure avec Gareth. Elle avait passé l'âge où mettre ses écouteurs sur ses oreilles et faire comme si le monde alentour n'existait pas était socialement acceptable. Alors ils n'auraient d'autres choix que se parler, ou bien s'enfermer dans un silence de mort. Pas besoin d'être voyante pour savoir que ça n'allait pas être une partie de plaisir.

Se levant de son lit, la jeune femme s'engagea sur le chemin de la salle de bains, mais fut bloquée à la porte. Elle était fermée, et de l'intérieur semblait venir un chant. «  Thomas ! J'ai besoin de me laver, bouge-toi ! » Un grognement lui répondit, et elle dût contiuer à taper sur le battant pendant au moins cinq minutes pour qu'il finisse par lui ouvrir. « Je commençais à me demander si tu t' étais pas noyé. »  Une douche et quelques minutes plus tard, on la retrouvait devant le miroir, appliquant consciencieusement de l'eye-liner sur ses paupières et un rouge à lèvres discret. Elle savait pertinemment que se maquiller ne servait pas à grand-chose, mais c'était quelque chose qu'elle détestait, montrer au monde ses cernes ou sa peau terne, c'était presque comme avouer qu'elle pouvait avoir des faiblesses, et elle était loin d'aimer ça.

Le téléphone posé à côté d'elle finit par sonner, délivrant un message sobre et concis. A son grand étonnement, Clara était totalement prête. En passant, elle ébouriffa les cheveux de son frère, attrapa son script, ses clés et son sac, puis descendit les marches quatre par quatre. C'était la première fois en presque dix ans qu'elle n'éprouvait presque aucun plaisir à retrouver Gareth. Pourtant, il faisait partie de sa famille, c'était indéniable. Avec la relation qu'elle avait avec sa génitrice, il fallait bien qu'elle se trouve de quoi se fonder son propre cercle familial ailleurs, et elle l'avait trouvé en la personne de son frère, forcément, et de son garde du corps. Ils avaient bien entendu dépassé de loin cette étiquette-ci, et si l'amitié n'avait pas eu grand impact, ce qui était arrivé après était une catastrophe. Elle se souvenait encore de son réveil en sursaut, de la sueur, des vomissements qui s'en étaient suivi. Les flashs de sang qui la poursuivaient, même encore dès qu'elle croisait son regard. Ce rêve, il la hantait, encore plus depuis que d'autres avaient vu un accent de vérité. Elle avait vu Damiàn, un inconnu dont elle n'aurait jamais pu rêver, et il avait été là. Elle avait vu l'accident de ce blond sur Coconut Grove, et il avait failli se produire. Il se serait sans doute produit si elle n'avait pas été là à hurler comme une folle. Si elle n'en était pas au stade de croire à un quelconque pouvoir, elle se sentait maudite, et elle ne pouvait pas se permettre que cette malédiction rebondisse sur lui. Jamais.

Entrant dans la voiture, elle répondit au « Salut » du Brown par un hochement de tête et un sourire discret. Ou gêné, elle avait du mal à l'heure actuelle à pouvoir expliquer la différence. Le silence s'installa directement, comme une ombre qui finirait par les écraser, ce genre de silence lourd qu'on veut juste voir finir mais que personne n'a réellement le courage de briser, sauf pour des banalités. « J'ai mon scénario alors rien d'important, en tout cas. »  Et ses papiers, elle avait tous ses papiers. C'était déjà ça. Le silence revint, inéluctable. La jeune femme se gratta la gorge, comme pour se donner un courage qu'elle n'avait pas. Mais elle détestait le silence. Il aurait bien continuer pendant une heure, les faire suffoquer, mais c'était pas son truc. Le malaise palpable de l'habitacle lui donnait envie de s'enfuir, mais ce n'était pas comme si elle avait le choix. «  Le trajet dure combien de temps? »   S'ils ne parlaient pas, autant qu'elle profite du chemin pour se concentrer sur son scénario. Aussi, elle le sortit et commença à le parcourir du regard. Sans pour autant réussir le moins du monde à se concentrer.
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Silence can't speak
•• En route vers Dublin
ft. Clara••
Le vrombissement du moteur fait doucement vibrer l'habitacle au rythme des accélérations et des décélérations que le garde du corps effectue d'un pied sur les pédales. Il en ressent la moindre secousse tant ses mains se crispent sur le volant sous le pesant malaise qu'il s'attend à sentir durant tout leur trajet. La mâchoire serrée, l'esprit embrouillé, il essaie pourtant de se convaincre qu'il va bien falloir crever l'abcès un moment ou un autre et, à la voir l'éviter comme elle le fait depuis des semaines, le texan se demande s'il aura une autre occasion que celle-ci.

Elle lui a répondu, c'est déjà ça, mais la conversation semble s'arrêter là un court instant, Gareth ne comptant pas chercher à l'alimenter si elle ne doit lui rendre que des réponses fermées. Ses œillades sont nerveuses vers les rétroviseurs qu'il contrôle bien plus que nécessaire et sa conduite se fait sèche et nerveuse, tant de par sa gêne qu'il tente de dissimuler que de par ce mode de conduite sans aucune logique auquel il ne s'est toujours pas fait. Rien d'étonnant alors à l'entendre pester contre les autres conducteurs à qui il impute toutes les fautes dès lors que leurs conduites contrarient la sienne.

Ses doigts serrent davantage le volant lorsque Clara prend la parole à son tour sans qu'il n'ait eu à l'y inciter et son pied s'abat sur la pédale de frein pour ne pas emboutir le véhicule qui vient de ralentir devant eux.

- Apprends à conduire, connard ! Son regard glisse vers le tableau de bord qui lui indique l'heure. Une demi-heure si tout va bien.

Son ton est neutre, presque froid sans être glacial pour autant. Le métamorphe réalise bien qu'il n'aide pas non plus à entretenir leur conversation qui aurait été tellement naturelle en d'autres circonstances. Il soupire en reportant son regard sur la route.

- Il y a quand même des risques pour que ça ralentisse en arrivant à Dublin.

Et vue l'heure, ça n'aurait rien d'étonnant. Mais ce paramètre a bien évidemment été pris en compte et il leur reste une bonne heure avant qu'on ne puisse les taxer de retardataires.
Gareth se maudit intérieurement devant la banalité de ses mots alors qu'il brûle d'évoquer un sujet autrement plus piquant. Cette appréhension qu'il éprouve à le mettre sur le tapis l'exaspère, tout comme ce besoin qu'il a de le faire avec elle.

Son regard bifurque brièvement vers la jeune actrice à l'attention portée sur son scénario. Grand bien lui fasse, mieux vaut qu'elle soit prête pour ce qui pourrait marquer le renouveau de sa carrière.

- Et merde. Son ton est soudain plus franc et bien moins conciliant. Il devrait la laisser se concentrer sur ce scénario, il devrait peut être même clouer son bec une bonne fois pour toutes et se faire une raison, mais il pressent que ce sentiment d'inachevé lui restera en travers de la gorge s'il la laisse s'en tirer. Il faut qu'on parle, Clara.
☾ anesidora
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Sayanel Z. Pritchard
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Silence can't speak

La voiture démarre alors que Clara se réfugie automatiquement dans la lecture de son scénario. Elle le connaît déjà par cœur, il ne faut pas se leurrer. Elle ne serait pas arrivée là dans sa carrière si elle n'avait pas les moyens d'une mémoire sans faille. Pourtant, elle faisait comme si elle avait encore quelque chose à en apprendre, quand bien même ce n'était pas le cas. Tout sauf subir ce silence gênant qu'elle avait elle-même instauré. Mais avait-elle eu réellement le choix ? Elle aimait à croire que non, qu'elle ne pouvait réellement en faire autrement alors que son âme était tiraillée entre des sentiments qu'elle n'acceptait pas encore réellement et ce rêve qui la hantait, encore et encore, lui rappelant que sa pensée avait de fortes tendances à se réaliser, surtout lorsqu'il s'agissait de véritables drames. Elle ne mettait bien sûr pas en lien son cauchemar de noyade avec le malheur qui les avait tous frappés, mais si elle l'avait fait, elle aurait sans doute compris plus rapidement ce qui était en train de lui arriver.

Clara ne pouvait faire autrement que se fondre dans un mutisme qui la tuait petit à petit. Elle avait toujours été du genre à parler, quand elle allait bien, quand elle allait mal, quand elle ne savait pas trop, raconter tout ce qui lui passait par la tête, passer du coq à l'âne en un rien de temps et rire de sa propre stupidité à ne pas supporter le silence, quel qu'il soit. Elle n'avait jamais trouvé un silence rassurant, alors que beaucoup semblaient parfois s'en délecter, et s'agacer à la moindre interruption. Mais pas elle. Le soulagement était palpable lorsqu'on faisait intervenir un son, qu'il s'agisse de musique ou de voix. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui, elle craignait d'entendre parler, d'entendre ce que Gareth voudrait bien lui dire. Elle ne pouvait pas s'expliquer, elle ne pouvait rien dire, rien regretter, rien admettre. Pourtant elle le devrait. Un bref sursaut lorsque les insultes sortirent de la bouche de son chauffeur. Elle ne s'en familiarisait d'ordinaire pas, mais la brusquerie et la violence qui pouvait en émaner ne faisait qu'accroître son angoisse. Et si c'était ça, et s'il perdait son calme, comme sur son volant, et si elle le tuait pour ça ? La Singer eut envie de se gifler. Il fallait qu'elle arrête les théories à la con, ça ne lui réussissait pas. Elle aurait eu envie d'oublier, faire comme si elle n'avait pas peur, arrêter de croire qu'elle était soudainement maudite d'un quelconque don de clairvoyance. Elle n'était pas dans une série SF. «  Je vais être largement dans les temps. C'est bien. » Le silence reprit sa place, pesant. Elle n'en avait pas l'habitude. Il était l'une des rares personnes avec qui elle n'avait jamais eu de mal à communiquer, notamment grâce au fait qu'elle ne se demandait pas s'il était sincère ou si seulement sa célébrité lui faisait de l'oeil. Beaucoup ne s'étaient intéressés à elle que par son nom, peu la connaissaient réellement, et encore moins n'auraient pu la faire rire. Sauf lui. Excepté maintenant.

La jeune femme hoche la tête face à sa réponse. Ils étaient partis en avance pour ça. Une demi-heure sans parler, ça pourrait être simple, ça pourrait se faire, puis elle pourrait fuir, loin de l'habitacle, loin de la tentation de tout lui dire au risque de passer pour une folle. Mais elle ne pouvait pas, juste pas avouer ce qu'elle croyait, elle était déstabilisée, taisait les voix qui commençaient parfois à s'élever dans son esprit, priant pour qu'elles ne soient qu'illusion.

Le ton change, et elle le pressent avant même de savoir ce qu'il a à dire. La jeune femme ferme les yeux brièvement, l'espace de quelques secondes. Elle aurait aimé qu'il fasse avec, qu'il ne la regarde pas et qu'il oublie ce qui avait bien pu se passer, parce que tout serait bien plus simple si c'était le cas. Si elle avait pu, elle serait revenue en arrière, elle ne se serait pas laissée aller, et elle n'aurait pas dormi, tout sauf ça, elle aurait gardé les yeux ouverts quitte à en finir à l'hôpital au lieu d'être rongée ainsi par ce qui pourrait se produire si elle baissait sa garde encore une fois. «  Je sais. » Elle n'en restait pas moins qu'elle ne voulait en aucun cas lancer la discussion. Clara n'avait jamais été la meilleure pour parler de ce qu'elle ressentait. Elle n'avait aucun problème à le faire pour ses personnages, mais pour elle-même, elle finissait par patauger. «  Je suis désolée. Ces derniers jours ont été plutôt … Difficiles.»
© Frimelda, sur une proposition de © Blork
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